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Ces étrangers qui ne le sont plus

Jean-François Cavin
La Nation n° 2059 9 décembre 2016

Sur 8’327’000 habitants (chiffre 2015, arrondi), la Suisse compte 2’048’000 résidents étrangers (près de 25%). Pour le Canton de Vaud, les chiffres sont les suivants: 773’000 habitants, 260’000 résidents étrangers (environ 33%). La proportion d’étrangers peut paraître considérable. Il convient toutefois de préciser que, parmi les étrangers, la part des titulaires d’une autorisation d’établissement est nettement majoritaire: 1’285’000 en Suisse, 154’000 dans le Canton. Il s’agit de personnes résidant ici depuis cinq ans au moins, généralement bien davantage, parfois depuis des générations.

Pendant longtemps, ces immigrés prenant racine chez nous ont rechigné à demander la naturalisation. La procédure était lourde et un brin humiliante, le coût assez élevé… et cela pour quel avantage? Le titulaire du permis d’établissement bénéficie à peu près de tous les droits, hormis les droits politiques et l’honneur d’accomplir le service militaire. Le nombre des naturalisations a certes beaucoup augmenté dans le passé récent; d’une part les procédures et les finances ont été allégées dans plusieurs cantons; d’autre part l’initiative contre l’immigration de masse, avec ses menaces réelles ou supposées envers la population étrangère, a probablement décidé beaucoup d’allogènes à acquérir le passeport suisse – le diable porte pierre. Mais il subsiste, comme on a vu, d’importants effectifs d’étrangers dont les familles sont bien intégrées, parfois depuis les parents ou les grands-parents.

Les Chambres fédérales ont adopté deux textes visant à offrir la naturalisation facilitée aux étrangers de la troisième génération. Un ajout constitutionnel d’abord, sur lequel nous voterons en février; il tient en six mots pour dire que la Confédération facilite la naturalisation, non seulement des enfants apatrides comme jusqu’ici, mais aussi «des étrangers de la troisième génération». Une loi, ensuite, approuvée en septembre passé mais qui n’entrera en vigueur que si la novelle constitutionnelle est acceptée.

Cette loi précise qui est l’étranger de la «troisième génération». C’est celui:

– dont un des grands-parents au moins est né en Suisse ou y a acquis un droit de séjour;

– dont un des parents a acquis l’autorisation d’établissement, a séjourné en Suisse pendant au moins dix ans et a accompli au moins cinq ans de scolarité obligatoire en Suisse;

– qui est lui-même né en Suisse;

– qui est lui-même titulaire de l’autorisation d’établissement;

– qui a lui-même accompli au moins cinq ans de scolarité obligatoire en Suisse.

La demande doit être faite jusqu’à l’âge de 25 ans révolus, car une demande plus tardive pourrait viser à éluder les obligations militaires (une disposition transitoire ouvre cependant la naturalisation facilitée aux personnes âgées de 26 à 35 ans pendant les cinq ans suivant l’entrée en force de la loi).

Cet étranger qui n’en est plus un, la loi présume son intégration. Il n’est donc soumis à aucune audition ni à aucun questionnaire. Mais il n’y a pas d’automatisme: l’intéressé doit formuler la demande auprès de sa commune, avant que le canton se détermine et transmette le dossier à l’office fédéral, qui octroie la nationalité sauf obstacle relevant de la police ou de la sûreté du pays.

La nationalité suisse n’est jamais que l’addition de vingt-six nationalités cantonales, lesquelles, d’ailleurs, ne sauraient trouver leur unique fondement dans le «droit du sang»: la présence effective et durable sur le territoire, la participation concrète à la vie du pays – économique, sociale, sportive – témoignent d’une intégration, et souvent d’une assimilation bien réelles. A la troisième génération, la naturalisation n’est plus qu’un constat. Nous voterons oui.

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