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Occident express 8

David Laufer
La Nation n° 2100 6 juillet 2018

Depuis quelques jours, la police nationale prépare une parade commémorative. Pourtant, au lieu de faire ses répétitions sur un aérodrome militaire, celles-ci ont lieu au centre ville, qui se trouve ainsi bloqué des jours durant. Les habitants de mon quartier maugréent, avec raison, et se moquent de cette manœuvre grossière de la part du gouvernement qui se donne ainsi l’occasion de faire étalage de ses muscles. Prenant un taxi, mon chauffeur et moi nous sommes ainsi retrouvés coincés à quelques rues d’ici, tandis que des blindés et des motards défilaient pour personne. Mon chauffeur, la cinquantaine bien tassée, s’est soudain mis à jurer à voix basse, lentement, avec dans le ton un mélange de haine et de dégoût. Il m’a m’expliqué qu’il était policier de formation et qu’il vivait en Suisse au début des années 90. Un ordre de marche lui est parvenu. Sa famille, craignant de se faire réprimander s’il ne se soumettait pas, l’a contraint de revenir en Yougoslavie. Intégré aux forces spéciales, il a été envoyé pendant des années au Kosovo pour appliquer les sinistres projets de Miloševi?. Mais avant de passer la frontière administrative, on lui a retiré son livret de service et tout signe distinctif. Il était de corvée pour les pires basses-œuvres d’État, mais sans aucune reconnaissance, avec une paye minable et une très forte probabilité d’y rester. De retour à la fin de ses missions, il a quitté la police et vendu son appartement à vil prix. Deux décennies plus tard, il est encore chauffeur de taxi. «On s’est servi de moi, on m’a forcé à risquer ma vie. J’ai tout sacrifié pour la police, et puis on m’a jeté comme un chien. Et regarde-les moi comme ils paradent, comme ils font les fiers. Pourquoi? Pour rien.» Il faisait chaud. Il a ouvert sa fenêtre, sorti son paquet de cigarettes et m’en a offert une. Tandis que je sortais, il m’a tapé sur l’épaule: «Allez, prends soin de toi, p’tit gars.»??

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