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Démographie

Jacques Perrin
La Nation n° 2115 1er février 2019

En 2009, les journaux ont annoncé que l’Allemagne pourrait disparaître dans douze générations. En 2005, Ursula von der Leyen, ministre de la Famille, mère de sept enfants, avait mis en place une politique nataliste, sans succès. Le taux de fécondité est resté de 1,4 enfant par femme. En 2016, 40% des femmes allemandes diplômées de l’enseignement supérieur n’avaient pas d’enfants; 20% des femmes ne seraient jamais mères; 20% des parents regrettaient d’avoir des enfants. La population allemande décline. L’arrivée de presque un million de migrants en 2015 n’a pas inversé la tendance.

Selon le philosophe allemand Peter Sloterdijk, moderniser consiste à aller toujours plus loin dans la direction du déracinement, du déni des origines et, si possible, d’une vie sans descendance. La modernité, c’est l’incapacité de se reproduire dans les limites de la ressemblance. Les bâtards et les métis sont chics. Il y a toujours eu des gens attachés à leur terre natale, mais la modernité a écrasé la vie rurale classique. Vers 1800, 80% de la population de l’Allemagne et de la France habitait et travaillait à la campagne. A la fin du XXe siècle, il ne reste plus que 3% de paysans.

Les dirigeants des principaux pays européens – Emmanuel Macron, Angela Merkel, Theresa May, Nicola Sturgeon (Ecosse), Mark Rutte (Hollande), Stefan Löfven (Suède), et Jean-Claude Juncker lui-même – n’ont pas d’enfants.

Croissez et multipliez ! Cette injonction biblique tarabuste les chrétiens, selon l’économiste Pierre de Lauzun.  Thomas Malthus (1766-1834), économiste et prêtre anglican, revient à la mode. L’humanité peut-elle survivre à une croissance infinie? Selon l’encyclique Laudato si’, l’accroissement de la population est possible si l’on remplace le consumérisme extrême par le partage et le refus du gaspillage. Les bonnes intentions suffisent-elles? On ne veut ni disparition ni prolifération. Les familles chrétiennes d’Occident devraient-elles faire plus d’enfants pour éviter l’extinction tandis que les chrétiens d’Afrique, eux, se modéreraient et contrôleraient les naissances  par des méthodes naturelles? On n’a pas fini de creuser la question des limites, dit Lauzun.

Selon l’historien Pierre Vermeren, en 2018, la natalité française est en baisse pour la septième année consécutive. Les 25-35 ans en couple ou mariés  sont de moins en moins nombreux. Leur «installation» définitive a lieu quand la fertilité féminine a déjà diminué. L’idée de Vermeren est que, contrairement à un mythe répandu, le baby-boom pourtant bien réel des Trente Glorieuses n’est pas responsable de l’accroissement de la population depuis la Libération. En 1939, la France avait 40 millions d’habitants. Avant même la Libération, tous les gouvernements en place, quelle que soit leur couleur politique, ont voulu relancer la démographie nationale. Ça a marché. La France a crû de 28 millions d’habitants de 1942 à 2018. Mais le baby-boom de 1942 à 1965 n’a fait que maintenir le niveau de 1939. L’augmentation est due à d’autres causes: le progrès économique et médical et l’allongement de la vie (10 millions de seniors de plus de 60 ans en 2017); l’intégration dans le calcul de la population des territoires d’outre-mer à forte démographie (3,5 millions d’habitants); 3 millions de rapatriés d’Algérie et leurs descendants; 8,5 millions d’immigrés musulmans du Maghreb et d’Afrique noire; 1 million d’immigrés africains chrétiens; 1,5 million d’Asiatiques; 5 millions d’Italiens (dont 3 millions sont rentrés chez eux); 1 million de Portugais et 500 000 personnes en provenance de l’Est de l’Europe.

L’écrivain Michel Houellebecq, ingénieur agronome de formation, s’intéresse à la génétique, à la reproduction et… au suicide. Il remarque que le baby-boom commence en 1942 alors que la France est humiliée comme jamais et s’achève en 1965, quand la France croit à nouveau au progrès et renoue avec l’abondance.

En 1979, la Chine lançait sa politique de l’enfant unique parce que l’accroissement de ses habitants pouvait nuire à son développement économique. Un vieillissement rapide de la population s’ensuivit. En 2016, un second enfant par femme a été autorisé. Les naissances ont d’abord augmenté, puis ont chuté à nouveau. Le coût de l’éducation, de la santé et du logement décourage les parents potentiels. Les couples chinois de la classe moyenne, dont les deux partenaires travaillent, n’ont pas envie d’avoir d’enfants du tout ou de deuxième enfant, car ils craignent la chute de leur niveau de vie. La multiplication des enfants uniques a engendré l’individualisme et l’hédonisme en Chine. Tel informaticien marié à une rédactrice en chef de magazine, tel banquier et sa femme responsable de projet dans un cabinet-conseil ne veulent pas perturber leur carrière.

En 2010, la Hongrie avait 1,3 enfant par femme. Viktor Orban a lancé une politique nataliste, mais avec 1,5 enfant par femme, la Hongrie ne renouvelle toujours pas sa population; il en faut 2,1. En outre, beaucoup de Hongrois émigrent. 600 000 d’entre eux vivent à l’étranger. Parce que la majorité des Hongrois refuse l’immigration (comme les Japonais), les démographes annoncent que la Hongrie, qui compte 9,7 millions d’habitants, n’en aura plus que 6 à 8 millions en 2070.

A la fin de 2018, l’Allemagne, où vit une personne sur six née à l’étranger, s’est dotée d’une nouvelle loi sur l’immigration sous la pression des fédérations patronales. Elle doit combler son manque de main-d’œuvre dans les secteurs de la logistique, de la mécanique, du soin aux personnes âgées et du bâtiment. Les syndicats et l’AfD craignent des conflits sociaux, l’exploitation de la nouvelle main-d’œuvre et le dumping salarial. Selon l’Agence pour l’emploi, l’Allemagne aura besoin chaque année de 400 000 travailleurs originaires de pays hors de l’UE pour faire face au vieillissement de ses actifs.

Le Grand Conseil vaudois a refusé un postulat de l’UDC Fabienne Despot qui demandait combien d’habitants le Canton peut «supporter». Beaucoup de gens s’opposent à la densification et s’irritent des trains bondés, des routes engorgées et des logements hors de prix. Une forte majorité du Grand Conseil craint qu’un débat sur la démographie ne dérive en procès de l’immigration. Le géographe socialiste Pierre Dessemontet déclare que le million d’habitants prévu naguère pour 2030 est aujourd’hui fixé à 2040 et qu’après 2040 l’augmentation cessera.

Le 4 janvier 2019, l’ancien ministre français de l’environnement Yves Cochet a dit dans l’Obs : Lorsqu’on assume d’être néo-malthusien, on est vite accusé de racisme ou d’élitisme. Je précise donc que je ne vise pas les pays les plus pauvres, qui font plus d’enfants que les autres. Au contraire. Les pays riches sont les premiers à devoir décroître démographiquement. Ce sont eux qui ont le mode de vie le plus polluant. Par ailleurs, limiter nos naissances nous permettrait de mieux accueillir les migrants qui frappent à nos portes.

Le militant panafricaniste Kémir Séba dit en substance qu’il n’en a rien à f… de l’Aquarius. Les Africains doivent rester sur leur continent au lieu de risquer leur vie sur la Méditerranée pour finir esclaves dans le sud de l’Italie.  Les multinationales se mettent d’accord avec les oligarchies africaines «pour se faire un maximum de blé». L’immigration crée des troubles dans les pays européens et saigne l’Afrique qui a besoin de ses habitants pour se développer à sa manière, non selon les critères occidentaux.

Les informations ci-dessus, glanées dans différents médias de 2016 à 2019, exigent des commentaires, qui suivront dans un prochain numéro.

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