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«Grève des femmes»: le Conseil d’Etat dans l’illégalité

Jean-François Cavin
La Nation n° 2119 29 mars 2019

La grève et la mise à pied collective sont licites quand elles se rapportent aux relations du travail et qu’elles sont conformes aux obligations de préserver la paix du travail ou de recourir à une conciliation.

(Article 23 alinéa 4 de la Constitution vaudoise)

La mode est aux grèves de démonstration politique. Pour ne pas parler de ce qui se produit en France, on a vécu chez nous les «grèves pour le climat» qui, même si l’on peut juger l’intention louable et certaines pancartes spirituelles, ont permis aux jeunes gens de courber les cours impunément (ce que le Canton de Fribourg, notamment, n’a pas admis). Et voici que se profile la «grève des femmes», agendée au 14 juin. Dans cette perpective, le Conseil d’Etat s’est fendu d’un communiqué dont voici l’essentiel, après un rappel de tout ce que l’Etat a entrepris pour assurer l’égalité des sexes dans son administration: Ainsi, même si les conditions de travail offertes aux employé-e-s de l’administration cantonale ne sauraient constituer une base suffisante pour un conflit collectif, le Conseil d’Etat souhaite que les revendications légitimes du mouvement national puissent être portées par les employé-e-s qui le désirent. Dès lors, il a décidé, dans l’hypothèse où les syndicats saisiraient l’organe de conciliation et d’arbitrage, qu’il ne contesterait pas un acte de non-conciliation ; la grève pourra ainsi être licite et il n’y aura pas de sanctions administratives.

Vous avez bien compris: en l’absence de conflit collectif, l’organe chargé de statuer sur les conflits collectifs, constatant que l’Etat-employeur est conciliant, délivrerait un acte de non-conciliation.

La «grève des femmes» du 14 juin est organisée comme une grève politique à l’échelon suisse, sans rapport avec un conflit du travail particulier. Ce genre de manifestation, dont la multiplication a fait assez de dégâts économiques et parfois matériels dans des pays voisins, viole les obligations résultant du contrat de travail et est proscrit par les normes constitutionnelles et légales. En exergue figure le texte topique de la Constitution vaudoise. La Constitution fédérale dit la même chose en substance. La loi vaudoise sur le personnel de l’Etat aussi, à son article 52:

1. Les collaborateurs de l’Etat respectent la paix du travail.

2. La grève est licite aux conditions cumulatives (c’est nous qui soulignons, à l’intention surtout du Conseil d’Etat) suivantes :

a) elle se rapporte aux relations de travail ;

b) elle concerne un conflit collectif ;

c) l’organe de conciliation a été saisi et a délivré un acte de non-conciliation ;

d) elle est proportionnée au but poursuivi et n’est utilisée qu’en dernier ressort.

Il ressort de ces textes clairs que les contorsions du Conseil d’Etat ne rendent en aucun cas cette «grève des femmes» licite, contrairement à ce que veut faire croire le communiqué officiel. A quand les prochaines «revendications légitimes» dont le gouvernement admettrait, ou même «souhaiterait» qu’elles puissent être «portées par les employé-e-s qui le désirent»? Les thèmes dans le vent ayant les faveurs de la gauche qui nous régit ne manquent pas. Et si l’on essayait, sur un registre plus institutionnel, une «grève pour la souveraineté» contre les empiètements inconstitutionnels de la Confédération en matière d’aménagement du territoire? Cause «légitime»! Voire, puisque le Conseil d’Etat oublie que «le droit est le fondement et la limite de l’activité étatique» (article 7 de la Constitution), une «grève pour le droit», avec des calicots proclamant «Halte à la violation des lois»?

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