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Référendum contre FATCA

Olivier DelacrétazEditorial
La Nation n° 1978 18 octobre 2013

Le référendum contre FATCA est en marche. La Ligue vaudoise s’y engage à fond. Le fallait-il, immédiatement après la lourde campagne contre l’initiative du GSsA? Nous avons jugé impossible de ne pas le faire, car l’«accord», présenté avec arrogance par les USA et signé en tremblant par le Conseil fédéral, symbolise une nouvelle ère de la politique mondiale, où le plus gros a décidé, purement et simplement, de rançonner le reste du monde… en particulier la Suisse.

Par simple loyauté, le Conseil fédéral aurait dû soumettre spontanément un traité d’une telle importance au référendum populaire. Mais le Conseil fédéral n’est plus un gouvernement, juste une administration encombrante et craintive.

Voyant que personne ne bougeait, la Ligue vaudoise a réuni les personnes et associations qui avaient manifesté leur désir de combattre FATCA, dont on trouve la liste au bas de la feuille de signatures encartée dans ce numéro de La Nation.

Cette coalition un peu hétéroclite s’est d’emblée mise au travail. Un premier stand a été tenu samedi dernier à Lausanne. Certaines des observations ci-dessous en sont tirées. Une chose est certaine, les signatures viennent facilement.

FATCA, trois significations

FATCA est l’acronyme de Foreign account tax compliance act, en d’autres termes, loi de mise en conformité fiscale des comptes étrangers. Il s’agit d’une loi fiscale qui s’étend aux sujets fiscaux américains où qu’ils se trouvent dans le monde.

FATCA, c’est aussi un accord bilatéral signé entre la Suisse et les Etats-Unis pour régler la façon dont la volonté américaine sera mise en œuvre en Suisse.

FATCA, c’est enfin la loi suisse d’application découlant de cet accord.

Quel référendum?

Contre lequel de ces textes fallait-il lancer un référendum? Pas la loi américaine, bien évidemment. La question se posait en revanche de savoir s’il fallait lancer deux référendums simultanés. L’un aurait visé l’«Arrêté fédéral portant approbation de l’accord FATCA entre la Suisse et les Etats-Unis», et l’autre la «Loi fédérale sur la mise en œuvre de l’accord FATCA entre la Suisse et les Etats-Unis».

Ces deux textes, en effet, sont publiés séparément et ouvrent l’un et l’autre une possibilité de référendum populaire.

De l’avis des juristes, attaquer l'accord suffit. La loi ne fait que mettre en œuvre l'accord. Si le référendum recueille les 50000 signatures nécessaires et que le peuple rejette l’accord en votation populaire, la loi d'application deviendra sans objet.

Ne pas confondre

On entendra souvent dire que les banques suisses doivent payer le prix de leurs malversations sur sol américain. Cela est vrai sur le principe. Certains citoyens suisses jugent même que la Suisse tout entière devrait adopter une attitude d’humilité et de repentance, et accepter de bon cœur les représailles, même excessives, des USA. C’est beaucoup plus discutable.

Mais ce qui est certain, c’est que FATCA n’a rien à voir avec cette question. FATCA est une loi promulguée par des Etats-Unis endettés jusqu’au cou, mais qui se sentent assez puissants pour se refaire une santé financière au détriment du monde entier. Cette loi ne diminuera en rien les pénalités imposées aux banques suisses convaincues de forfaiture.

Le secret bancaire

Les gens de gauche disent qu’ils sont pour FATCA parce qu’ils sont contre le secret bancaire. C’est que, pour eux, la notion de secret bancaire, essentiellement malhonnête, signifie fraude, dissimulation d’argent sale et blanchiment.

En réalité, ces actes délictueux sont des dérives d’un principe juste. Le secret bancaire est essentiellement une protection de la sphère intime du client. C’est une forme du secret professionnel, analogue au secret médical. Rien de plus, rien de moins. Je n’ai pas besoin d’être un malfrat pour désirer que mes affaires personnelles soient protégées de la curiosité excessive de l’Etat de Vaud, de la Confédération ou du fisc américain.

Or, FATCA fait voler en éclat ce secret-là pour tous les contribuables américains. Il faut d’urgence réhabiliter et défendre le secret bancaire.

Qui est américain?

Le fisc américain a une conception extensive du contribuable américain. Un binational, lors même qu’il ne serait jamais allé aux Etats-Unis, est, fiscalement, un Américain. Il en va de même pour le conjoint suisse (ou de n’importe quel autre pays du monde) d’un ou d’une Américaine.

Selon ce que le conseiller national Christophe Darbellay, partisan de l’accord, a lui-même déclaré à la radio, passer de trop longues vacances aux USA fait de vous un contribuable américain. Il semble même que des études complètes dans une université américaine suffisent pour vous faire tomber dans la nasse.

Nous croyons que la Suisse doit sa protection à toutes ces personnes menacées, d’autant plus qu’elle a toujours eu une conception territoriale et non personnelle de la fiscalité.

Un flou «évolutif»

Le problème s’aggrave du fait que la définition du «contribuable américain» relève entièrement de la loi américaine. Elle changera, et sans notre avis, le jour où le fisc américain le jugera profitable. Nous avons signé un traité qui peut se modifier sans notre aval et dont les modifications s’imposeront à nous.

Il serait en outre bien imprudent d’imaginer que cette évolution se limitera à la définition du contribuable américain. A quand la taxe universelle de protection, tribut payé par tous les citoyens du monde à l’IRS?

La Suisse a refusé l’EEE notamment parce qu’elle refusait le principe même du droit évolutif. Pourquoi l’accepterait-elle de la part des Américains?

Appliquer le droit américain La loi d’application prévoit que le droit américain s’appliquera directement. En d’autres termes, les tribunaux suisses seront contraints d’appliquer le droit pénal (évolutif!) américain. Cette ineptie à elle seule justifie le référendum.

A propos des banques

«Fuck les banques!» nous dit un énergumène mou à catogan qui remonte la Madeleine, tout fier de son mot, et sans savoir que les banques, officiellement en tout cas, sont en faveur de l’accord.

Un employé de banque s’arrête au stand, indigné. Indépendamment des difficultés et des coûts élevés de la mise en place de FATCA, il s’est rendu compte qu’on lui demandait de piétiner les principes mêmes de confidentialité et de loyauté qui sont à la base de son métier. Il signe et nous demande de lui envoyer la liste de signatures par internet: «Je vous fais plus de cinquante signatures à mon étage!»

Tous les banquiers ne réagissent certes pas dans ce sens, en tout cas ceux qui n’ont de la profession qu’une conception financière. Au vrai, ils paniquent complètement. Ils raisonnent à leur habitude en termes de comparaison quantitative: les Américains sont plus forts que nous, donc il faut se coucher, le plus vite sera le mieux. Vivant dans l’abstraction des chiffres et l’immédiateté des ordinateurs, ces financiers sont psychologiquement fragiles, désemparés, poltrons.

Les Américains les menacent, s’ils ne se conforment pas à leur diktat, de leur infliger des amendes monstrueuses, et s’ils s’obstinent, de les exclure du marché des capitaux américains. Nos banques et le gouvernement fédéral ont trop vite pris ces menaces pour de l’argent comptant. Notre diplomatie s’est absurdement hâtée de signer, comme s’il y avait une prime à la vitesse de l’aplatissement. Or, il n’est pas exclu que le monde ne satisfasse pas aussi facilement aux exigences du fisc américain. Il est possible aussi qu’un refus suisse inspire d’autres gouvernements. La Chine a d’ores et déjà envoyé balader l’IRS. Or, FATCA ne peut fonctionner que si tous les Etats du monde s’y soumettent.

Américanophobie

Les arguments proprement politiques que nous donnons à ceux qui s’approchent de notre stand ne les touchent que secondairement. Ce qui anime les signataires, c’est d’abord l’américanophobie, ensuite la widmerschlumpfophobie. Evelyne Widmer, c’est notre affaire. Mais le gouvernement américain doit savoir qu’il amasse chez ses anciens amis suisses beaucoup de rancœur et de mépris, sur sa tête, ce qui est compréhensible, mais aussi sur celle de tous ses concitoyens.

Il doit se poser la question de savoir si les technocrates du fisc américain, qui sont encore pires que les nôtres, n’ont pas construit une machine à Tinguely aussi amorale qu’inefficace qui finira par se retourner contre lui.

Nous vous demandons une aide de tous les instants

La campagne est lancée. Vous trouverez une liste de signatures encartée dans ce numéro de La Nation. Nous vous prions de la remplir avec les signatures de citoyens suisses habitant la même commune et de nous la renvoyer sans délai. Nous tenons à votre disposition des listes de signatures supplémentaires, en papier et en format pdf, en français, en allemand et en italien, ainsi que des bulletins de versement. Nous attendons aussi une aide de votre part sur les marchés que nous organiserons. On les trouvera mentionnés au fur et à mesure sur notre site www.stopfatca.ch.

A partir de maintenant, nous travaillons en flux tendu jusqu’à l’aboutissement.

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