«Cruauté russe»: on nous écrit

C’est entendu: l’homme est une bête cruelle et chaque nation a sa manière d’être cruelle. Dans son article intitulé «Cruauté russe», Jacques Perrin oublie de dire le rôle primordial, en dehors du caractère national, que l’idéologie a joué dans les pires atrocités de l’histoire. Il faudrait donc parler de «cruauté soviétique» plutôt que russe, ne serait que parce que le bourreau en chef était géorgien et que parmi les gardiens de la Révolution russe, d’autres nationalités se sont distinguées par leur sadisme, comme les Lettons. Cette même idéologie communiste, importée d’Allemagne en Russie, avait pour ambition de faire oublier à chaque nation ses valeurs ancestrales. Elle a inspiré sous d’autres latitudes des débordements de cruauté tout aussi graves qu’en Russie, comme en Chine et au Cambodge, ou encore à Cuba et en Corée du Nord.

Que l’on parle de la France de la fin du XVIII^e ou de l’Allemagne et de l’Union soviétique du XX^e, les idéologies et les révolutions qui les ont portées au pouvoir ont été les véritables facteurs déclencheurs de vagues de barbarie. En faisant table rase des institutions – civiles et religieuses –, le nouvel idéal, souvent imposé par la violence, a donné aux bourreaux et aux tortionnaires une justification à des actes, qui auraient été réprimés dans le régime ci-devant.

On ferait bien de s’interroger aussi sur les violences commises à l’heure actuelle au nom de l’idéologie démocratique, ou prétendue telle, et qui sont souvent présentées comme un acte justifié pour atteindre le but recherché, à savoir l’instauration d’un régime soi-disant meilleur. Ainsi la propagande américaine arrive-t-elle à faire passer pour des bavures inévitables, des dégâts collatéraux ou une ingérence nécessaire, des actes qui sont qualifiés de crimes contre l’humanité, lorsqu’ils sont commis par le camp adverse «non démocratique». Dans la liste des nations coupables au XX^e et XXI^e siècles, M. Perrin devrait à coup sûr rajouter les Etats-Unis d’Amérique.