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Principe de précaution

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 2074 7 juillet 2017

Dans Le Retour de Don Camillo, le vieux docteur Spiletti tente de convaincre Nero, un militant communiste, que l’âme existe et que chacun en a une. «Si tu es sûr de ne pas l’avoir, ton âme, vends-la moi, je te l’achète!» L’affaire est conclue pour mille lires, et le communiste se moque: «Mille lires pour rien: la vieillesse vous a ramolli le cerveau…» Pourtant, plus tard, Nero, un peu gêné, va consulter un autre médecin en lui demandant de bien regarder s’il n’aurait pas «là, à l’intérieur, quelque chose qui n’y serait plus»… Préoccupé, perturbé, vaguement malade, il finit par retourner vers le docteur Spiletti pour lui rendre les mille lires en déclarant: «L’affaire est annulée et chacun reprend son bien.»

Cet épisode nous est revenu à l’esprit il y a environ un mois, lorsque la direction du CHUV, à Lausanne, a découvert avec consternation que la chapelle de l’hôpital était régulièrement utilisée par des catholiques qui venaient y prier contre l’avortement. Une interdiction d’accès a aussitôt été prononcée et il a été décidé que la chapelle serait fermée aux heures où ces prières devaient avoir lieu. On n’est jamais trop prudent, en effet. Mais ces mesures seront-elles suffisantes? La direction du CHUV est-elle consciente que certains intégristes sournois sont capables de prier n’importe où, sans remuer les lèvres et sans joindre les mains? A quoi les reconnaîtra-t-on? Cette dame derrière vous dans l’ascenseur, ce monsieur qui paie un ticket de parking, ces jeunes parents qui attendent dans le hall d’entrée: comment savoir s’ils ne sont pas en train de prier secrètement pour des causes beaucoup moins avouables que l’égalité hommes-femmes, la redistribution des richesses ou la protection de l’environnement? Seul Dieu pourrait les dénoncer, mais acceptera-t-Il de collaborer?

Nous nous égarons. Nous sommes au XXIe siècle, dans une société moderne, laïque et rationnelle où chacun sait que Dieu n’existe plus et que la prière n’est qu’une superstition sans aucun effet. Seulement voilà… Deux mille dix-sept ans de chrétienté semblent avoir laissé quelques traces de superstition même dans les esprits les plus modernes. Les prières n’ont aucun effet, sans doute, mais dans le doute, il vaut mieux les interdire et verrouiller la porte à double tour. On n’est jamais trop prudent!

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