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Discours du 1er Août

Yves Gerhard
La Nation n° 2101 20 juillet 2018

La fête que nous appelons fédérale approche. Nombreux sont les syndics, municipaux, députés et autres autorités qui se creusent la tête pour leur discours. Nous avons pensé à eux et rédigé le texte qui suit. Les orateurs en panne d’idées nouvelles pour l’occasion peuvent l’utiliser librement. Nous souhaitons à tous une belle Fête du 1er Août.

Yves Gerhard

Chères Vaudoises, chers Vaudois, chers Confédérés, chers amis de l’étranger qui partagez avec nous la joie de notre Fête fédérale,

1er Août 1291: la première date de la Suisse! Nous avons bien raison de fêter l’anniversaire de ce pacte qui est à l’origine d’un pays qui trouvera ses contours définitifs en 1815, il y a à peine plus de deux cents ans. A l’époque du pacte, à la fin du XIIIe siècle, ce ne sont en effet que trois vallées qui défendent leurs libertés, et se promettent assistance et entraide mutuelles en cas de menace extérieure. Dans nos bons livres d’histoire, nous nous rappelons la carte des cantons primitifs, autour de leur lac aux formes complexes, avec le Saint-Gotthard au sud. A l’extérieur de leurs frontières, le papier reste blanc, comme si rien n’existait d’autre de la Suisse actuelle! On sait que la mort de Rodolphe de Habsbourg, le 15 juillet 1291, a renforcé le désir de liberté des Waldstätten et les a stimulés à conclure le pacte: il fallait profiter du vide laissé par ce décès et agir vite. A peine connue la nouvelle, les trois vallées ont uni leur destin et conclu le pacte du début d’août.

Dans notre pays, le Pays de Vaud, la disparition de Rodolphe de Habsbourg n’a pas non plus laissé nos ancêtres indifférents. Mais avant d’en arriver à cette date, il convient de rappeler les grandes étapes du XIIIe siècle vaudois. Le comte Thomas de Savoie, avec l’appui de l’évêque de Lausanne, des sires de Grandson, de La Sarraz, de Cossonay et de Vufflens, réussit à s’emparer de Moudon, possession reconnue en 1207; en 1214, la «Ville Neuve de Chillon» est fondée, avec un hôpital, et un traité est signé à Burier. Le septième fils du comte Thomas, Pierre de Savoie, par son mariage, obtient des droits à Orbe et à Rue. Comme il était l’oncle du roi Henri III d’Angleterre, il disposait de revenus importants. Grâce à son argent, sa diplomatie et son prestige personnel, il s’empare de la région de Romont, où il fonde une ville en 1240, puis il réunit sous sa suzeraineté les sires de Grandson, de Champvent, d’Aubonne, de Cossonay, de La Sarraz, d’autres encore, qui reconnaissent Pierre comme leur seigneur. Ce dernier reçoit aussi les Clées, qui contrôlent le passage entre Orbe et Pontarlier. Il a la confiance de ses vassaux, au point qu’il peut se rendre à treize occasions en Angleterre chez son neveu. En 1263, Pierre devient comte des Etats de Savoie, qui sont ainsi, par le jeu des successions, rattachés au Pays de Vaud. Il met en place une administration nouvelle – précisément celle que les Waldstätten avaient refusée – avec des fonctionnaires révocables, soumis au bailli de Moudon.

A sa mort en 1268, son frère Philippe lui succède jusqu’en 1285, puis ses deux neveux se partagent le territoire: Amédée V reçoit la Savoie et le Chablais, ainsi que les seigneuries de Grandson, Cossonay et Aubonne, et Louis, sire de Vaud, obtient Moudon, Romont, Les Clées et Yverdon, où Pierre de Savoie avait construit le château que nous voyons encore aujourd’hui. Des villes nouvelles sont créées: Yverdon, Morges, Rolle, La Tour-de-Peilz, qui adoptent les franchises et libertés qui étaient celles de Moudon et qui deviennent le droit commun partout. Le Pays de Vaud que nous connaissons, avec ses petites villes et ses châteaux, prend son aspect original à cette époque, sauf que Lausanne et Lavaux, avec Bulle, Lucens et Avenches, appartiennent à l’évêque de Lausanne – la ville ne deviendra capitale qu’en 1803! En 1293, Amédée et Louis réussissent à vaincre le sire de Prangins et s’emparent de Nyon: la frontière ouest du Canton n’a plus changé depuis lors.

Revenons à la mort de l’empereur Rodolphe de Habsbourg qui, rappelons-le, avait assisté en octobre 1275 à la consécration de la cathédrale de Lausanne en présence du pape Grégoire X. A sa mort, en juillet 1291, l’effervescence domine aussi chez nous: Amédée et Louis reprennent Payerne et Morat, villes qu’avait conquises Rodolphe quelques années auparavant; ils assurent leur protectorat sur Berne et font le projet d’assiéger Fribourg! Mais le souci de leurs nouvelles villes et des terres environnantes a prévalu sur ces ambitions…

Voilà, chères concitoyennes et chers concitoyens: en 1291, le Pays de Vaud existait bel et bien, il mérite de figurer sur les cartes du XIIIe siècle, même si son histoire ne s’arrête pas là – ni celle de la Confédération d’ailleurs. Nos ancêtres, tout en défendant leurs libertés et franchises, celles données à Moudon en 1285, avaient accueilli les Savoie comme leurs souverains, criant «Vive Savoie!» sur leur passage. Ils avaient aussi accepté le nouveau régime des baillis, et ceux-ci étaient dans leur grande majorité des Vaudois – et les districts des XIXe et XXe siècles reprenaient à peu de choses près les bailliages du Moyen Age savoyard.

En 1291, le Pays de Vaud se constituait et il était bien vivant. Aujourd’hui, dans la Suisse contemporaine, le Canton l’est toujours, grâce à vous, à votre travail, à votre engagement dans nos communes et notre beau pays. Bon 1er Août!

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