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Actualités  |  Mardi 19 novembre 2013

Conseil fédéral, paysans, compétitivité

Le conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann a recommandé à l'agriculture suisse d'être plus compétitive: «Je suis persuadé, a-t-il déclaré en présentant le Rapport agricole 2013, que la qualité suisse à des prix forts est très demandée. Je prends l'exemple du yoghourt: à Hongkong, la classe supérieure se développe et le yoghourt peut être vendu à des prix premium. Cela crée de la valeur ajoutée qui aura un effet positif ici.»

On se frotte les yeux devant ces considérations désinvoltes, à peine dignes du café du Commerce. Car il y a peu de métiers où les efforts de modernisation, de restructuration des exploitations, de limitation des coûts et de réduction des prix ont été aussi vigoureux et efficaces que dans notre agriculture.

Ajoutons qu'aujourd'hui la plupart des paysans sont contraints d'exercer un métier complémentaire, tant les prix qu'on leur impose sont bas. Ils résistent malgré tout, dans des conditions dures encore aggravées par les exigences écologiques, ou plutôt écolo-technocratiques des administrations fédérale et cantonales.

Si la compétitivité se manifeste par une volonté impérieuse de vivre et de résister, par le courage d'affronter les vents contraires et par la capacité de se remettre en question, on peut affirmer que notre agriculture est exemplairement compétitive.

Et puisqu'on y est, il n'est pas sans intérêt non plus d'examiner la compétitivité internationale de M. Schneider-Ammann et de ses collègues. Le Conseil fédéral a pour tâche première de faire respecter la souveraineté suisse par les autres Etats. Or, son acceptation du système FATCA, contre lequel un référendum bat actuellement son plein, a manifesté un désintérêt absolu à l'égard de cette notion. Comme si la Suisse n'existait pas.

Au début de l'été, le même Conseil fédéral a soumis aux Chambres une loi pour régler les affaires bancaires pendantes (Lex americana) en refusant d'en livrer le contenu aux parlementaires, sous prétexte que l'administration américaine ne le permettait pas! Une seule volonté, s'écraser.

On a vu aussi Mme Widmer-Schlumpf, incapable de faire valoir, sinon sa dignité, du moins celle de sa fonction, patienter durant trois quarts d'heure dans la salle d'attente du ministre français Moscovici. Elle en est revenue avec une convention sur les successions en tous points désavantageuse pour nous. Pas de lutte, pas de résistance, mais une plate servilité qui devient l'image de toute la Suisse.

Quant à la capacité de se remettre en question, et pour rester dans le domaine agricole, rappelons-nous le ratage économique et qualitatif total du Cassis-de-Dijon. Pas la moindre autocritique du Conseil fédéral, pas le moindre retour sur lui-même, pas le moindre enseignement tiré publiquement.

Le Conseil fédéral pourrait trouver d'utiles leçons de compétitivité dans une agriculture vis-à-vis de laquelle il manifeste tant d'ignorant mépris.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 19 novembre 2013)