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Actualités  |  Mardi 7 mai 2013

L'Ecole vaudoise, passé, présent, avenir

Le passé de l'Ecole vaudoise, c'est cinquante ans de réformes visant toutes à élargir l'accès au gymnase et à l'université. Toutes, chacune à sa manière, ont réduit la place du latin et du grec, retardé le moment de l'orientation, allongé – contre en bas et contre en haut – la durée de la scolarité, centralisé les bâtiments scolaires, unifié les filières, les programmes, les méthodes, les manuels et la formation des enseignants. Chacune d'elles nous a été présentée comme le système idéal et définitif, puis, dès sa mise en oeuvre et sa confrontation décevante avec la réalité, rejetée comme étant une «école de papa», en d'autres termes, dépassée.

Le présent de l'Ecole vaudoise, c'est la mise en oeuvre de la LEO, la loi sur l'enseignement obligatoire votée en septembre 2011. Elle prévoit de supprimer la voie conduisant aux apprentissages (VSO), réputée «stigmatisante». Les deux voies restantes, c'est-à-dire la générale (VSG) et la prégymnasiale (VSB), accueilleront chacune la moitié des élèves. C'est du moins la théorie.

La pratique est fort différente. Selon les critères établis, le Collège d'Oron, par exemple, devrait orienter en prégymnasiale non pas la moitié, mais soixante-huit pour cent de ses élèves, soit plus des deux tiers!

Le tiers restant, orienté en voie générale, se retrouvera exactement dans la même situation «stigmatisante» que la VSO de naguère. La plupart des parents recourront contre cette répartition, ce qui contraindra le Département de la Formation d'abaisser ses exigences.

La mise en place, controversée, de la LEO promet donc d'emblée une nouvelle guerre scolaire. Les spécialistes du Département, qui ont toujours une nouvelle réforme en perspective, en profiteront pour dénoncer l'«élitisme» obstiné de l'école vaudoise. Ils proposeront qu'on abandonne «enfin» le système à deux voies au profit d'une voie unique pour toute la scolarité obligatoire – leur but de toute éternité. Pour donner au peuple le sentiment de la maîtrise et de la continuité, ils baptiseront l'opération «LEO Plus».

Tous les élèves étant ensemble, on ralentira le rythme pour éviter de trop creuser l'écart entre les meilleurs et les moins bons. Et pour qu'ils sortent néanmoins tous avec une formation minimale, la question se posera forcément de prolonger l'école obligatoire jusqu'à dix-huit ou dix-neuf ans.

Une telle prolongation serait une catastrophe pour l'apprentissage traditionnel. Soit les apprentis finiraient au plus tôt à vingt-deux ans, ce qui est très tard, soit l'apprentissage commencerait à seize ans comme aujourd'hui, mais dans un cadre exclusivement scolaire, à l'écart de la vie professionnelle.

Il n'est donc pas absurde de prévoir une disparition progressive de l'apprentissage dual, malgré l'excellence reconnue du système. Si aucune opposition ne se manifeste assez tôt, les mécanismes mis en oeuvre il y a cinquante ans nous y conduiront fatalement.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 7 mai 2013)