Détournement de pensée

Une affiche, en ville, a attiré notre attention. On y voit le dessin d’un petit garçon dont on comprend qu’il doit être le fils de Guillaume Tell. Plusieurs flèches sont fichées dans le mur derrière lui, à côté de la pomme qu’il tient sur sa tête. Et le bambin de s’exclamer: «Beaucoup trop à droite, papa!» De prime abord, on devine la critique inlassablement ressassée par tous les médiocres qui tentent de se faire un nom dans le petit monde médiatique romand: la Suisse est trop à droite, elle vote UDC, elle renvoie les demandeurs d’asile et brutalise les gentils casseurs gauchistes.

Mais l’affiche nous révèle que cette caricature fait partie d’une exposition intitulée «les mythes qui font rire les Suisses». On réalise alors que le dessin doit être compris au second degré: le mythe intello-gauchiste d’une Suisse «trop à droite» fait rire les Suisses lorsqu’ils voient le socialisme triompher, l’insécurité galoper, les demandeurs d’asile se prélasser et les penseurs alternatifs casser impunément.

On ne croit évidemment pas une seule seconde à cette interprétation. Les humoristes de chez nous n’ont pas le sens du second degré; et si le dessinateur en question avait eu ne serait-ce qu’une once de sens critique, il aurait été banni de l’exposition. Mais cette dernière, que nous n’irons pas voir, nous aura au moins fait rire; n’était-ce pas son objectif? Pour une fois que ceux qui font profession d’être drôles y parviennent…