Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Suivez le guide - Place de la Palud

Ernest Jomini
La Nation n° 1954 16 novembre 2012

Comme annoncé dans la dernière Nation, nous vous invitons à faire avec nous une ballade historique à travers Lausanne. rendez-vous à 9h50 devant l’hôtel de Ville. Plusieurs personnes se présentent pour «visiter Lausanne à pied»: un couple de retraités français, un autre d’espagnols, deux étudiants catalans, un couple de Lausannois et un jeune Français avide de poser des questions essentielles sur la Suisse: âge de la retraite, sécurité sociale, durée du travail hebdomadaire, bref toutes les questions qui passionnent nos voisins d’outre-Jura.

Notre visite commencera à côté de la fontaine dominée par la statue de la Justice. Sur le coup de 10 heures apparaissent, au-dessus de la Pharmacie de la Palud, des petits personnages qui défilent et nous rappellent les principaux événements qui ont eu lieu ici: l’arrivée du major Davel venu pour libérer le Pays de Vaud du joug bernois, défilant à la tête du bataillon de Lavaux devant les Lausannois éberlués, le 31 mars 1723. Puis la proclamation de l’Indépendance vaudoise le 24 janvier 1798: les troupes françaises du Directoire ont passé la frontière pour venir libérer le Pays de Vaud de la domination bernoise. Le drapeau vert de l’éphémère république lémanique flotte à une fenêtre, comme le rappelle la plaque apposée sur la maison proche de la fontaine. Apparaissent ensuite les députés du nouveau Grand conseil vaudois qui siègeront pour la première fois à l’hôtel de Ville le 14 avril 1803. Le nouveau canton de Vaud est né, conséquence de l’Acte de médiation imposé par le premier consul Bonaparte.

La Palud mérite bien son titre de place lausannoise historique. Il faut se placer au bon endroit, là où l’on aperçoit la tour de la cathédrale. car la voix qui commente les événements est celle du guet. Il raconte ce qu’il a vu du haut de sa tour.

Le guet: c’est le moment de parler de cet étrange personnage, dont la voix accompagne les heures des nuits lausannoises. Si beaucoup de villes européennes ont retrouvé la coutume du guet pour charmer les touristes, à Lausanne il est en fonction depuis le Moyen âge et jusqu’à aujourd’hui sans aucune interruption. Nous sommes donc très fiers d’avoir conservé le guet dont l’existence surprend les touristes de passage. mais nous n’oublions pas non plus le fou rire prolongé d’un groupe de jeunes Français. Ils ne pouvaient pas concevoir qu’au XXIe siècle on puisse encore maintenir une pareille coutume.

Quittons pour un instant les événements de 1798 et 1803 et plongeons-nous dans le moyen âge en montant quelques mètres dans la rue de la Mercerie. Une inscription sur une pierre rappelle qu’à cet endroit se trouvait la porte Saint-Etienne. elle séparait la cité, où l’évêque et le chapitre exerçaient directement le pouvoir temporel, et la Palud et les autres quartiers de la ville dotés d’autorités municipales. C’est à cette porte que tout nouvel évêque devait se rendre après sa nomination. La main posée sur le saint Evangile, le prélat promettait de respecter les libertés et franchises des bourgeois de la ville. ensuite seulement les Lausannois promettaient fidélité et obéissance à leur seigneur l’évêque. Le respect de ce serment n’allait d’ailleurs pas sans mal, ni pour l’un, ni pour les autres.

Mais revenons sur la place de la Palud. Davel avait passé sa première nuit à Lausanne à côté de l’hôtel de Ville chez le major de Crousaz, sans se douter que les magistrats lausannois préparaient son arrestation en rassemblant les milices lausannoises. Voyant cette nouvelle troupe le matin au sortir de la maison, Davel comprit immédiatement qu’il avait été trahi. Il remit son épée au capitaine Descombes en déclarant: «Je vois bien que je serai la victime de cette affaire: mais n’importe! Il en reviendra quelque avantage à ma patrie.»

Terminons par la fontaine où les ménagères lausannoises venaient faire la lessive à la fin du XIXe siècle, jusqu’à ce que l’installation de l’eau courante dans les maisons leur facilite la tâche. La colonne qui soutient la Justice porte la date de 1585. mais c’est une copie; c’est pourquoi on s’est permis de la repeindre avec des couleurs vives. L’original est au musée historique. Sous la jupette de la Justice, quatre petits personnages sont censés s’inspirer de cette vertu: l’empereur, le pape (bizarre pour la Lausanne protestante!), le sultan (l’Islam déjà) et l’avoyer, magistrat de la ville. La Justice tient d’une main la balance, signe de l’équité à l’égard des parties opposées.

Au lendemain d’une Fête de Lausanne, un plaisantin agile avait réussi à grimper et à déposer une bouteille de bière sur l’un des plateaux de la balance qui penchait de façon inquiétante. heureusement, la balance a rapidement retrouvé son équilibre. Par contre, on a réussi par deux fois dès 2009 à dérober le glaive tenu dans l’autre main, symbole du châtiment que la Justice réserve aux coupables.

Cette absence du glaive symbolique a-t-elle été le signe de l’impuissance de la ville face aux délits qui se multiplient? en dernière minute, nous apprenons que la justice a retrouvé son glaive.

Signe que la ville change de politique et que les malfaiteurs subiront les rigueurs de la justice!

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: