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Indigène, vraiment?

Jean-Michel Henny
La Nation n° 2080 29 septembre 2017

Près de 92% des Vaudois ont accepté le nouvel article constitutionnel sur la sécurité alimentaire. Ils pensaient certainement donner un coup de pouce aux paysans suisses. Leur vœu nous réjouit.

Mais l’interprétation de cet article 104a suscite déjà le débat1.

Un comité regroupant notamment les Verts, le parti socialiste et le parti libéral–radical salue l’ouverture au marché, car ce contre-projet à l’initiative de l’Union suisse des paysans permet toujours de conclure des accords de libre-échange avec d’autres pays qui contribuent au développement durable de l’agriculture, pour reprendre ses termes2.

Est-ce vraiment ce que voulait l’Union suisse des paysans en lançant son initiative en 2014?

Le groupe de réflexion (aujourd’hui, on devrait écrire «think tank») Avenir Suisse affirme déjà que l’article 104a de la Constitution fédérale ne marque pas un tournant fondamental dans la politique agricole suisse; l’ouverture du marché agricole est urgente et nécessaire, car elle bénéficierait notamment aux consommateurs suisses, en faisant baisser les prix des denrées alimentaires; au niveau du commerce extérieur, la Suisse évolue dans une situation délicate; en limitant les concessions en matière de tarifs douaniers agricoles, les représentants des lobbies paysans réduisent sensiblement la marge de manœuvre des négociateurs suisses et compliquent la conclusion de nouveaux accords de libre-échange; mais le conseiller fédéral Schneider-Ammann a affirmé récemment que le libre-échange était indispensable pour garantir la sécurité alimentaire. Ces quelques affirmations sont tirées d’une tribune offerte à Avenir Suisse dans le journal Terre & Nature du 31 août 2017.

En acceptant le contre-projet concocté par les Chambres fédérales, et en retirant son initiative, l’Union suisse des paysans a renoncé au cœur de son texte. En acceptant la suppression de la référence à la production indigène, elle a capitulé. Qu’a-t-elle obtenu en compensation? A-t-elle pensé aux 150’000 signataires de l’initiative?

Certes, la campagne qui a précédé la votation a été une belle opération de communication. Les paysans en avaient-il besoin? Qu’en retireront-ils? Probablement rien de positif, car la voie est maintenant clairement ouverte à la négociation et à la conclusion de traités internationaux prétendument destinés à garantir la sécurité alimentaire mais qui pourront faire abstraction de la production indigène puisqu’elle n’existe plus constitutionnellement.

Cette votation était-elle un coup d’épée dans l’eau? Pire que cela, un méchant boomerang.

Notes:

1  La sécurité alimentaire, vraiment? La Nation no 2078 du 1er septembre 2017.

2  Un large soutien à «l’agriculture indigène», Le Temps du 25 septembre 2017, p. 4.

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