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Actualités  |  Mardi 28 novembre 2017

Coup de force en douceur

En Suisse, ce qui touche à la religion est l'affaire des cantons. Il existe toutefois une «Fédération des Eglises protestantes de Suisse», qu'on connaît surtout par son acronyme FEPS. Les 6 et 7 novembre, à Berne, les délégués de la FEPS ont travaillé sur la révision de sa constitution. Au terme de la session, ils ne s'étaient prononcés que sur dix des quarante et un articles du projet. Une séance de relevé aura lieu en avril 2018 et le vote final tombera avant la fin de l'année prochaine.

Les délégués ont longuement discuté pour savoir si, selon la nouvelle constitution, la FEPS serait une Eglise ou une «communion d'Eglises». Autrement dit, il fallait décider si la FEPS resterait une simple fédération ou deviendrait une «Eglise suisse», qui réduirait les Eglises actuelles au rang d'arrondissements ecclésiastiques. Sur le fond, rien de  nouveau: depuis que la FEPS existe, elle s'efforce inlassablement d'accroître son pouvoir et son influence au détriment des Eglises locales.

En réalité, quelle autorité est en droit de décider sur une question aussi essentielle? A notre avis, aucune. Pour ce qui est de l'Eglise vaudoise en tout cas, son autonomie est un donné historique fondamental qui échappe aux détenteurs passagers du pouvoir et, a fortiori, à l'assemblée de la FEPS.

Quoi qu'il en soit, les délégués romands se sont battus contre l'idée d'une Eglise suisse. Les délégués des autres Eglises cantonales les ont suivis. La FEPS restera donc une fédération et les Eglises cantonales conserveront leur autonomie.

Mais dans la foulée, et en contradiction avec cette décision, les délégués ont également voté pour que la FEPS s'appelle désormais «Eglise évangélique réformée de Suisse». Les Romands auraient-ils canné à mi-chemin?

Ainsi donc, quand la FEPS prendra position sur des questions théologiques, morales ou politiques, les autorités, la presse, la population en général et les fidèles en particulier diront: «L'Eglise pense, dit, veut, soutient, recommande, dénonce ceci ou cela.» Le président du Conseil de la FEPS, M. Gottfried Locher, doit jubiler: «Ils ont accepté le mot, ils accepteront la chose.»

On nous demandera s'il faut vraiment accorder autant d'importance à ces questions de pouvoir. Répondons d'abord que c'est aux organes dirigeants de la FEPS qu'il conviendrait de poser la question. Dans les faits, les Eglises cantonales ont des statuts et des pratiques très différents, à l'image des milieux religieux, sociaux et culturels dans lesquels elles font leur travail. Cette situation justifie pleinement leur volonté de préserver leur autonomie. Et il ne peut y avoir d'autonomie locale sans un pouvoir local qui la fasse respecter.

La constitution n'étant pas encore votée, il est toujours possible de décoller cette étiquette mensongère.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 28 novembre 2017)