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Une Histoire de l’Eglise à la fois monumentale et personnelle

Denis Ramelet
La Nation n° 2115 1er février 2019

L’Eglise étant le commencement du Royaume de Dieu dans ce monde, l’histoire de l’Eglise se trouve étroitement liée à celle du monde. Ecrire l’histoire de l’Eglise, c’est donc, d’une certaine manière, écrire l’histoire du monde. C’est pourquoi toute histoire de l’Eglise un peu approfondie compte au minimum plusieurs centaines de pages, plus souvent plusieurs milliers (pensons par exemple à la fameuse Histoire de l’Eglise de Daniel-Rops). Celle dont nous allons parler ne fait pas exception. Commençons toutefois par dire quelques mots de son auteur, M. Jean-Marc Berthoud.

M. Berthoud, ami de la Ligue vaudoise depuis bientôt un demi-siècle, est un chrétien fervent. Membre depuis une quarantaine d’année de l’Eglise réformée baptiste de Lausanne, il a animé pendant vingt ans la librairie La Proue et enseigné pendant dix ans la théologie biblique et l’histoire de l’Eglise dans le cadre du Collège biblique de Lausanne. Pendant toutes ces années, il a publié plusieurs livres aux éditions L’Age d’Homme (dont il dirigeait la collection «Messages») ainsi que des dizaines d’articles.

M. Berthoud a entrepris de refondre une partie de ses livres et articles, ainsi que ses cours au Collège biblique, dans une monumentale Histoire alliancielle de l’Eglise dans le monde, dont les deux premiers tomes, de chacun 700 pages, sont parus en 20181. Trois autres tomes, du même calibre, sont attendus pour cette année et celles qui suivent.

L’adjectif «allianciel(le)» renvoie bien sûr à l’alliance que Dieu a conclue avec l’humanité dès la Création et dont le symbole – toujours visible – est l’arc-en-ciel que Dieu fit apparaître après le Déluge. L’alliance de Dieu avec l’humanité a d’abord été préfigurée par l’Ancienne Alliance (l’Ancien Testament) avec le peuple d’Israël, scellée par le don des Tables de la Loi à Moïse sur le Mont Sinaï, avant d’être consommée dans la Nouvelle Alliance (le Nouveau Testament) avec l’Eglise (le nouveau Peuple élu que Dieu s’est choisi au sein de toutes les nations), scellée par le Sacrifice de Jésus sur la Croix.

Le tome 1 embrasse l’Antiquité et le Haut Moyen Age: les origines de l’Eglise d’après les Actes des apôtres, les persécutions et la figure de saint Maurice, le combat de saint Irénée de Lyon contre la gnose, l’hérésie arienne et le symbole de Nicée-Constantinople, le concile de Chalcédoine définissant l’Incarnation du Christ (union de la nature divine et de la nature humaine, sans confusion ni séparation), saint Augustin face aux crises pélagienne et donatiste, saint Jérôme et la Vulgate, l’essor du pouvoir pontifical au Haut Moyen Age, la séparation entre l’Orient et l’Occident (en insistant sur l’importance du patriarche Photius). Ce premier tome se termine par quelques anticipations dans le Bas Moyen Age: saint Bernard «le dernier des Pères», la Scolastique (son origine, sa méthode, ses dérives), l’équilibre de saint Thomas d’Aquin, qui s’appuie d’une part sur la «révélation générale» (le monde créé par Dieu) et d’autre part sur la «révélation spéciale» (la Bible inspirée par Dieu).

Le tome 2 couvre le Bas Moyen Age et la Réforme. Il s’ouvre par trois chapitres consacrés à des aspects politiques et juridiques: les conceptions de saint Thomas d’Aquin en la matière, les origines de la théorie du contrat social, l’apogée du pouvoir pontifical. Il traite ensuite saint Grégoire Palamas et sa doctrine des «énergies» divines, la décadence nominaliste, le combat entre Luther et Erasme au sujet du libre-arbitre, la figure de Bullinger (successeur de Zwingli à Zurich et auteur de la Confession helvétique postérieure). Ce tome se termine sur quatre chapitres consacrés à notre Pierre Viret, ce «géant oublié de la Réforme», dont M. Berthoud est l’un des bons connaisseurs.

Chaque volume comprend une bibliographie de plusieurs dizaines de pages, un index des citations bibliques, un index des noms cités, un index des notions et une table des matières.

Cette histoire de l’Eglise n’ayant pas été conçue d’emblée comme telle mais résultant – nous l’avons dit – d’une refonte, les divers chapitres qui composent chacun des tomes ne sont pas homogènes, tant au niveau du style que de l’approfondissement. Si l’ensemble porte la marque des fortes convictions réformées de M. Berthoud, l’ampleur du champ de vision est tout à fait impressionnante: dans quelle autre histoire de l’Eglise trouve-t-on des approfondissements à la fois sur Photius, saint Thomas d’Aquin et Pierre Viret? De même, si l’on n’est pas obligé d’approuver toutes les critiques de M. Berthoud envers saint Augustin ou les papes du Moyen Age, ni tous ses éloges envers Photius ou Wyclif, ses prises de position sont toujours argumentées et donc stimulantes.

Outre les interprétations de l’auteur, une grande richesse de l’opus magnum de M. Berthoud sont les innombrables citations qu’il contient. Combien, parmi les lecteurs de La Nation, ont déjà lu, dans le texte, Tyconius, Photius ou Bullinger? Toute personne intéressée par l’histoire de l’Eglise se doit désormais d’avoir le Berthoud dans sa bibliothèque.

Notes:

1  Les tomes de L’Histoire alliancielle de l’Eglise dans le monde peuvent être commandés sur le site www.lulu.com, au prix d’une quarantaine de francs la pièce.

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