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Salaires vaudois: bonnes nouvelles!

Jean-François Cavin
La Nation n° 2118 15 mars 2019

C’est bien connu: les salaires stagnent depuis dix ans; la main-d’oeuvre étrangère, avec la libre circulation, les tire vers le bas; l’écart entre les peu payés et les bien payés tend à se creuser; les postes à bas salaires se multiplient; la discrimination salariale dont souffrent les femmes perpétue une injustice criante. C’est si bien connu, puisque vous l’entendez ou le lisez tous les jours, qu’il n’est même pas besoin de le vérifier.

Et pourtant! Le Courrier de Statistique Vaud – le service officiel de statistique du Canton – vient de révéler des chiffres qui disent tout le contraire.

D’abord, de 2006 à 2016, le salaire médian brut dans le secteur privé a augmenté de 9,1% nominalement et, inflation quasi nulle déduite, de 8% en valeur réelle. Précisons que le salaire médian (la moitié des salariés gagne plus, la moitié moins) donne une meilleure image de la réalité que le salaire moyen, qui peut être influencé par les caprices des extrêmes. Ce salaire médian atteint 5’990 francs par mois. La hausse reflète bien la prospérité constante de l’économie vaudoise, malgré le franc fort, les turbulences vécues par l’industrie bancaire, et l’on en passe. On s’en réjouit; encore faut-il ne pas l’occulter.

Dans la fonction publique, le salaire médian atteint 7’410 francs brut. N’en concluez pas trop vite que les agents de l’Etat sont des privilégiés, car ils sont en moyenne plus longuement formés que dans le secteur privé, plus âgés et au bénéfice d’une ancienneté supérieure. Il est toutefois utile de noter que, emplois privés et publics confondus, le salaire médian de l’ensemble des Vaudois dépasse nettement 6’000 francs.

Les bas salaires (définis dans la statistique comme ceux qui sont inférieurs à deux tiers du salaire médian, soit 4’000 francs en 2016) sont le lot de 9,1% des travailleurs vaudois du secteur privé. Cette proportion est en forte baisse depuis 2008, où elle atteignait 12,5%. Une diminution de presque un quart, ça se salue!

La dispersion des salaires se réduit aussi. Calculée selon une formule dont on vous fait grâce, tout en remarquant qu’elle ne tient pas compte des extrêmes, elle était en 2016 la plus faible depuis 2008. Bon à noter, même si, selon la définition, on ne considère pas tout l’éventail.

Les salaires des frontaliers, qui occupent en général des emplois un peu plus modestes que les résidents, reste légèrement inférieur à celui de ceux-ci. Il atteint tout de même 5’810 francs par mois, ce qui explique l’attrait de notre pays, et sa croissance est plus marquée que celle du salaire médian d’ensemble. Il semblerait donc que ce sont les salaires suisses qui tirent ceux des frontaliers vers le haut, et non ceux des frontaliers qui tirent nos rémunérations vers le bas.

L’écart salarial entre les sexes diminue au fil des années; il était de 17,2% en 2008 et s’est réduit, presque de moitié, à 9,3% en 2016! Encore s’agit-il d’une différence qui s’explique en majeure partie par des données objectives, telles que le niveau de formation, le type d’emploi, la position hiérarchique. Si l’on cherche l’écart subsistant après avoir tenu compte de ces données constatables, la part dite «inexpliquée» de l’écart se réduit à 4%. Et même cette part «inexpliquée» résulte notamment de caractéristiques individuelles objectives, mais que la statistique n’appréhende pas: l’expérience professionnelle des salariés, leur compétence réelle, leur régularité au travail (absentéisme), leur esprit d’engagement, etc. Si l’on ajoute que la statistique dont on parle ici n’englobe pas le secteur public, où la discrimination liée au sexe devrait être minime ou nulle, on est près de conclure que le problème est pratiquement résolu dans notre Canton. Qu’on se le dise à l’approche d’une certaine «grève des femmes», qui se veut emblématique mais qui est surtout injustifiée (et d’ailleurs illégale).

Voilà, grâce à Statistique Vaud, de quoi modérer les rengaines misérabilistes («Toujours plus de pauvres dans notre pays!»), calmer le zèle social du compromis dynamique, faire taire les clameurs des idéologues («Halte au sacrifice des femmes!») et inspirer des titres retentissants à notre presse. Mais les chiffres contredisent les idées reçues. Vous n’avez donc pas lu ces grands titres, sauf dans La Nation.

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