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Aymon de Montfalcon, évêque de Lausanne

Antoine Rochat
La Nation n° 2120 12 avril 2019

En été 2017, un colloque interdisciplinaire s’est tenu à l’Université de Lausanne, consacré à Aymon de Montfalcon, personnage important de l’histoire vaudoise. Les actes de ce colloque ont été publiés à la fin de l’année dernière1, dans un beau livre qui mérite notre intérêt.

Né en 1443 à Flaxieu (Bugey, en Savoie), Aymon de Montfalcon est d’abord moine bénédictin, puis conseiller du duc de Savoie et abbé de Hautcrêt. Il est nommé évêque de Lausanne en 1491 par le pape Innocent VIII. Il meurt à Lausanne en 1517. Son neveu Sébastien de Montfalcon lui succède à l’épiscopat, jusqu’à la conquête bernoise de 1536 et le passage à la Réforme.

Le prélat et le diplomate

Sous la protection de la Maison de Savoie, Aymon de Montfalcon dirige fermement sa principauté épiscopale pendant plus d’un quart de siècle. Il se montre attentif à ses prérogatives temporelles aussi bien qu’à ses fonctions diocésaines.

Ambassadeur de la cour de Savoie et du roi de France, notamment auprès des Confédérés helvétiques, l’évêque de Lausanne peut être considéré comme un spécialiste des affaires diplomatiques.

On le voit aussi apparaître dans une curieuse affaire judiciaire, les procès Jetzer, menés entre 1507 et 1509 à Lausanne et à Berne. Un frère convers qui prétendait avoir eu des apparitions de la Vierge Marie, mais aussi deux de ses supérieurs d’un couvent dominicain, furent condamnés au bûcher, contre l’avis d’Aymon de Montfalcon2.

Un prince lettré en son château

Politicien avisé et mécène averti, Aymon de Montfalcon a été protecteur des lettres et poète lui-même. Au début du XVIe siècle, il a fait réaliser un ensemble remarquable de peintures murales dans le château Saint-Maire, à Lausanne.

Dans le corridor du rez-de-chaussée, on peut admirer – aujourd’hui encore – des décors peints inspirés des poèmes allégoriques des Douze Dames de Rhétorique, de Georges Chastelain, et du Bréviaire des nobles, d’Alain Chatrier3.

Dans la salle dite «des conférences» du même château, les travaux récents ont remis à jour une peinture originale, montrant une femme nue, sur un cheval fou, en train de galoper vers un rocher4. On a cru d’abord qu’il s’agissait d’une allégorie de la vérité, mais les études récentes ont montré qu’il s’agit d’une mise en garde de la jeunesse, dont la fougue risque de s’écraser contre le rocher de la (mauvaise) fortune!

Un évêque flamboyant et sa mémoire

La troisième partie du livre met en évidence l’héritage important laissé par Aymon de Montfalcon à la cathédrale de Lausanne: suppression de l’ancien passage à pied et pour véhicules à travers l’édifice, construction d’une chapelle Montfalcon5, avec ses magnifiques stalles en bois, et surtout le portail occidental6, construit au début du XVIe siècle, reconstruit fin XIXe - début XXe siècle, et restauré tout récemment.

Notons enfin que l’on trouve les armoiries d’Aymon de Montfalcon au château Saint-Maire et à la cathédrale de Lausanne, mais aussi au château de Glérolles (à Rivaz). On y trouve aussi sa devise personnelle Si qua fata sinant, tirée de L’Enéide de Virgile, que l’on traduit généralement par «si le destin le permet»7.

Conclusions

Les travaux de restauration récents du Château cantonal et de la Cathédrale ont remis en lumière un personnage important et un moment charnière de l’histoire vaudoise.

Aymon de Montfalcon donne à la fin de la période savoyarde un éclat particulier, marquant à sa manière le passage du Moyen Age à la Renaissance. Les traces de son action sont encore bien visibles aujourd’hui, et le livre publié par l’Université de Lausanne le rappelle à bon escient.

Notes:

1  Aymon de Montfalcon. Mécène, prince et évêque de Lausanne (1443-1517), volume édité par Bernard Andenmatten, Dave Lüthi, Jean-Claude Mühlethaler et Brigitte Pradervand, Etudes de Lettres, Lausanne 2018, 336 p. et 16 planches couleurs.

2  «La défense d’une cause perdue. Le rôle de l’évêque Aymon de Montfalcon dans les procès Jetzer (Berne, 1507-1509)», par Kathrin Utz Tremp, op. cit., pp. 63 à 84.

3  «Les peintures murales du château Saint-Maire. Autour des modèles allégoriques du prince-évêque», par Karen Straub, op. cit., pp. 131 à 150.

4  «Sagesse proverbiale à l’usage d’une cour: le cheval de Jeunesse, le rocher de Fortune», par Jean-Claude Mühlethaler, op. cit., pp. 151 à 173.

5  «La chapelle Montfalcon à la cathédrale de Lausanne», par Kérim Berclaz, op. cit., pp. 241 à 258.

6  «Le portail occidental de la cathédrale de Lausanne: tradition et modernité d’un grand chantier gothique», par Dave Lüthi, op. cit., pp. 291 à 310.

7  «Devises, armoiries et portraits d’Aymon de Montfalcon: un évêque en représentation», par Brigitte Pradervand, op. cit., pp. 311 à 333.

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