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Actualités  |  Mardi 9 avril 2013

S'instruire de l'exemple français

Personne n'attribuera au seul président Hollande la responsabilité de la dégradation de son pays en matière de morale publique, de cohésion sociale et d'activité économique. L'échec est imputable à la droite autant qu'à la gauche. La gauche n'a pas su moraliser la politique – c'est le moins qu'on puisse dire –, et la droite non plus. La droite n'a pas pu restaurer la prospérité – 400'000 chômeurs industriels de plus sous le président Sarkozy –, et la gauche pas davantage.

Woerth et Cahuzac, les délocalisations et le chômage, les hausses d'impôts et la fuite des capitaux, l'étatisme stérilisant et le libéralisme destructeur, c'est l'échec du régime politique lui-même qui, toutes idéologies confondues, clopine vers sa fin, un pas à droite, un pas à gauche.

Le Figaro rappelle que tous les présidents français ont promis de simplifier la bureaucratie. Aucun ne l'a pu. Au contraire, la mauvaise graisse qui engorge l'appareil politique n'a cessé de croître et de s'opacifier. On peut gager que le discours sur la moralisation de la vie publique, lui aussi de toutes les présidences, connaîtra le même sort.

L'impasse où se trouve le pouvoir français fait le lit des extrêmes, disent les commentateurs. C'est possible à court terme. Mais le «coup de balai» mélenchonnien ou la proposition frontiste de dissoudre l'Assemblée sont des effets de muscles à but électoral. La dégradation est trop générale, les divisions sont trop profondes, les intérêts particuliers trop présents. On n'y remédiera pas en se contentant de changer le personnel politique.

Une véritable renaissance demanderait une action politique durable dans une nation unie, deux exigences incompatibles avec la brutalité des luttes électorales et la brièveté des mandats présidentiels.

La Suisse a beaucoup à perdre à cette déroute. Elle devrait au moins en profiter pour tirer quelques enseignements sur ce qu'il convient de faire et, surtout, de ne pas faire. Or curieusement, nous sommes toujours tentés de rapprocher nos institutions de celles de notre grande voisine.

On attend ainsi monts et merveilles d'une caisse maladie unique, refusant de voir que la «Sécu» est une débâcle exemplairement ruineuse. On veut faciliter l'exercice du droit de grève, on demande que l'Etat impose un salaire minimum, bien que de telles exigences court-circuitent le principe du dialogue entre les partenaires sociaux, l'une des clefs de notre prospérité. On unifie tant qu'on peut l'école sur le plan fédéral, sans tenir le moindre compte de la paralysie pathologique de l'Education nationale française. On fait de même avec la police, la justice et la santé sous prétexte d'une efficacité… certes non démontrée de l'autre côté du Lac.

On propose même que le Conseil fédéral soit élu par le peuple, dans l'idée de placer de fortes personnalités au pouvoir. Là encore, pourtant, l'exemple actuel de la France n'est guère convaincant.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 9 avril 2013)