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L’Europe contre nos armes

Edouard Hediger
La Nation n° 2039 4 mars 2016

Depuis quelques semaines, l’annonce de discussions autour d’une directive de l’Union Européenne visant à réglementer le commerce des armes aux particuliers secoue le monde des tireurs helvétiques. L’UE entend, entre autre, interdire les armes à feu automatiques, même neutralisées, et assurer l’échange d’informations entre Etats membres. Conformément aux accords de Schengen et Dublin, la Suisse serait contrainte de reprendre cette directive dans son droit. Quelles en seraient les conséquences pour le citoyen soldat et le tireur sportif?

Tout d’abord, l’inutilité de la mesure surprend. En effet, en ajoutant contraintes et mesures policières sur les tireurs sportifs, chasseurs et collectionneurs, elle ne s’attaque pas aux flux d’armes illégales posant justement problème après les récents événements. La Suisse dispose pourtant déjà du matériel législatif adéquat. L’ordonnance sur les armes (OArm) en vigueur depuis 2008 interdit l’acquisition aux ressortissants de certains pays «à risque». De plus, un permis d’acquisition d’arme requiert une demande à la police et une vérification du casier judiciaire. Une personne qui désire donc se procurer une arme fera l’objet de tous les contrôles nécessaires au niveau cantonal. Les terroristes ne se fournissant pas à la bourse aux armes de Lausanne et il est douteux que les mesures proposées par l’Union européenne aient une quelconque efficacité sur les flux illégaux. Seul un contrôle systématique et souverain des frontières et un travail en amont, dans les pays d’origine de ces armes, pourraient avoir l’effet escompté.

En interdisant en Suisse les armes automatiques qui, rappelons-le, sont en grande majorité des fusils et pistolets d’ordonnance utilisés comme armes de tir sportif, la directive aurait un impact désastreux sur les sociétés de tir. Celles-ci ne vivent pour la plupart que grâce à ces armes d’ordonnance et aux membres qui les utilisent, en particulier lors des tirs militaires. Cette directive pourrait être intéressante si elle proposait de rendre obligatoire des cours de sensibilisation, de manipulation et de tir avant l’achat d’une arme, donnant ainsi aux sociétés un rôle clé dans ces formations. Ce n’est malheureusement pas le cas. Déclarer est une bonne chose, former et responsabiliser est encore meilleur puisque de cela découle une valeur ajoutée éducative. De plus, une interdiction des armes automatiques aurait également un impact direct sur le citoyen soldat. L’arme à la maison, attribut par excellence du système de milice, n’y résisterait pas. L’arme personnelle règle pourtant un rapport entre le citoyen et l’Etat. Elle fournit à l’individu un moyen de contribuer au droit à la contrainte et à la défense de sa communauté, l’intéressant ainsi directement à sa propre sécurité. L’arme à la maison est une permanence, un rappel physique de cette responsabilité. Retirer celle-ci au citoyen, c’est le déresponsabiliser et lui signifier que la communauté n’a plus confiance en lui.

Finalement, en 2011, le peuple et les cantons ont voté contre un fichier centralisé fédéral des armes en circulation. En voulant «interconnecter les registres nationaux de détention d’armes», cette directive européenne mènerait à un fichier centralisé européen. Que reste-il de la souveraineté populaire dans un tel cas de figure? Une telle mainmise de l’Europe sur la sécurité d’un Etat souverain, a fortiori non membre de l’Union, n’est pas acceptable. Surtout quand cette dernière n’est plus à même d’assurer la sécurité de ses Etats membres. Suite à une interpellation au Parlement, le Conseil fédéral a rappelé l’obligation de s’adapter aux accords de Schengen. Une non reprise pourrait aboutir à la cessation de la coopération. Mais Schengen étant de toute façon passablement mis à mal par la crise migratoire et la directive devant être adaptée au droit suisse, la Confédération pourrait garder une marge de manœuvre importante. De plus, il n’y a aucun doute qu’avec 175’000 membres et 3’100 associations, la Fédération sportive suisse de tir ne manquera pas de rassembler les signatures indispensables à un référendum.

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