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A bas l’impôt fédéral direct!

Olivier DelacrétazEditorial
La Nation n° 1803 2 février 2007
Le parti radical suisse, emmené par sa section genevoise, a inscrit la suppression de l’impôt fédéral direct à son programme. Ses motifs sont de deux sortes. Le premier est lié à l’évolution des échanges économiques. L’internationalisation des affaires, centuplée par l’immédiateté d’internet, produit en quantité croissante des gains impossibles ou presque impossibles à taxer, tant ils vagabondent anonymement d’un coin du monde à l’autre. Ce n’est finalement qu’au moment de la consommation que le virtuel rejoint le réel et qu’il est possible de percevoir un impôt d’une manière ciblée et proportionnée. De là un intérêt croissant pour les impôts indirects au détriment de l’impôt direct.

Le second argument est de politique étrangère. Il s’agit pour la Suisse d’harmoniser ses pratiques avec celles de ses voisins européens qui, statutairement, connaissent tous une TVA d’au moins 15%. Selon M. Pierre Maudet, on compenserait ainsi les effets parfois douteux de la concurrence fiscale entre les Etats européens. Ce deuxième argument est moins probant. Si les cantons jugent nécessaire de le faire, ils peuvent décider de modifier leurs pratiques eux-mêmes et sans passer par un alignement sur les Etats de l’Union. Comme les Suisses ne le savent que trop bien, toute harmonisation partielle est grosse d’une harmonisation complète.

Pour compenser le manque à percevoir, les radicaux proposent d’abord d’élever le taux de la TVA. Pour répondre à la gauche, qui considère l’impôt indirect comme antisocial parce qu’il ne contribue pas à la redistribution des richesses, ils envisagent de moduler fortement le taux en fonction de la plus ou moins grande nécessité du produit frappé. Ils envisagent aussi la création d’une fiscalité «écologique», un impôt sur l’énergie, par exemple, ou une taxe sur le CO2.

Dans son article «A bas l’impôt fédéral direct!» (1), Mme Chantal Tauxe reprend ces arguments et en rappelle un plus classique: «La mort de l’IFD […] redonnerait sa lisibilité d’origine au système fiscal: les impôts directs aux cantons, les indirects à la Confédération». Dans L’Hebdo précédent, M. le conseiller d’Etat Broulis allait dans le même sens: «La répartition des impôts directs et indirects devrait être revue. Les premiers devraient aller aux cantons et aux communes, les seconds à la Confédération.»

De fait, la Suisse connaît deux niveaux de pouvoir et il serait logique de définir les compétences fiscales de chacun en fonction de sa nature et de son rôle. Il est absurde que le canton et la Confédération frappent le citoyen de deux impositions directes distinctes. Au pouvoir originel et à la compétence générale des cantons correspond l’impôt direct, celui qui touche directement les personnes. La Confédération, elle, n’a que des tâches déléguées et sectorielles. Les impôts indirects lui suffisent parfaitement pour les accomplir.

Le but de l’opération n’est pas de payer moins d’impôts ni de mettre l’Etat sur la paille. Il s’agit simplement de payer d’une façon plus conforme aux réalités politiques et économiques de la Confédération et des cantons.

La suppression de l’impôt fédéral direct touche aussi les cantons. Selon l’article 128, alinéa 4 de la Constitution, 30% du produit brut de l’impôt fédéral direct, soit environ quatre milliards, leur est attribué, dont un sixième au moins est affecté à la péréquation financière intercantonale. Les cantons pourront compenser cette perte par une augmentation de leur imposition directe.

Outre la simplification administrative et les économies qui résulteraient de la suppression de l’aller-retour canton- Confédération-canton, la restitution de cette capacité fiscale dispenserait les cantons d’aller quémander des sous à la Confédération, attitude peu digne d’Etats souverains. Elle leur rendrait aussi la responsabilité de la péréquation intercantonale, dont l’initiative pour la suppression de l’IFD, retirée en 2002 contre l’avis des représentants de la Ligue vaudoise, prévoyait expressément qu’elle serait «maintenue au moins à son niveau actuel».

Les idées justes ne meurent jamais. Il est encourageant que ce combat de toujours de la Ligue vaudoise soit relancé par des politiciens assez éloignés de nos préoccupations et qui ajoutent de nouveaux arguments aux arguments fédéralistes traditionnels. Le mouvement prend de l’ampleur.


NOTES:

1) L’Hebdo du 25 janvier 2007.

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