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Populisme du Matin, chagrin

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 1919 15 juillet 2011
L’UDC, si l’on en croit les journaux sérieux, est un parti sécuritaire qui exploite la peur des gens et rêve d’une société policière et répressive. Soit. Mais dans le registre hyper-sécuritaire, nous avons désormais mieux que l’UDC. Ici, les fanatiques des armes et amoureux des képis ne s’appellent pas Blocher et Freysinger, mais Fabiano C. et Vincent D.1 Ils sont journalistes au Matin. On les a vus à l’œuvre récemment, lorsqu’un prisonnier de soixante-quatre ans, incarcéré depuis de nombreuses années, a faussé compagnie à ses gardiens et s’est évanoui dans la nature pendant quelques jours.

Sans se soucier une seule seconde de comprendre pourquoi l’homme en question était devenu un criminel, sans chercher à savoir si son enfance avait été malheureuse ni s’il était une victime de la société de consommation bourgeoise et capitaliste, les rambos du quotidien orange nous ont gratifiés d’un déluge de pas moins de vingt-trois articles aux relents affreusement populistes, réunis sous le titre générique «Dangereux tueur en fuite»; surfant sur les peurs de la population, on y dénonçait le laxisme de la police et le traitement scandaleusement humain réservé à ce «sociopathe» (sic). Pourquoi ce dernier avait-il eu le droit de sortir de son cachot? Pourquoi n’était-il pas entravé par des chaînes? Pourquoi ne portait-il pas une muselière de fer? Pourquoi ne l’a-t-on pas abattu à la mitrailleuse lourde au moment où il faisait mine de s’enfuir? Ah, le beau western qu’on aurait eu si les shérifs Fabiano C. et Vincent D. avaient été là avec tout leur armement!

Voilà donc, cher lecteur, comment réagissent les collaborateurs du Matin. Cette nouvelle montée de l’intolérance fait peur.

Notons au passage le contraste saisissant entre le journaliste Fabiano C. qui écrit le 29 juin 2011: «Cela semble hallucinant: lundi, lorsqu’il s’est évadé, Jean-Louis B. était accompagné de deux agents de détention qui n’étaient pas armés. […] Qui a décidé que les agents ne seraient pas armés?», et le journaliste Fabiano C. qui, le 21 avril 2010, rendait hommage à «Sébastien, 18 ans, [qui] a perdu la vie dimanche matin, tué d’une balle tirée par un policier vaudois […], abattu alors qu’il se trouvait sur l’autoroute A1». Soit il s’agit de deux Fabiano C., l’un détestant la police lorsqu’elle tire sur un criminel, l’autre détestant la police lorsqu’elle ne tire pas sur un criminel; soit il s’agit d’un seul et même journaliste qui déteste la police tout le temps (ce que ses autres articles semblent confirmer), mais qui accorde moins de valeur à la vie d’un vieux Jurassien ayant passé des années en prison qu’à celle d’un ado de la banlieue lyonnaise venu faire des affaires en Suisse. Racisme anti-vieux ou racisme anti-Jurassiens?

1 Noms connus de la rédaction du Matin.

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