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Mme Juliette Rod

Daniel Laufer
La Nation n° 2069 28 avril 2017

Il y a bien longtemps, dans les années soixante, peut-être même en 1959, on pouvait voir un samedi matin de fin mai, dans les bois du Jorat, une équipe de messieurs d’âges divers dont le pas élancé, le clair regard et le verbe haut dénotaient immédiatement le mépris naturel de la démocratie parlementaire. Tout ce petit monde se dirigeait d’un pas sur vers la vallée de la Broye. On arrive à Hermenches, et on s’apprête à pique-niquer. Il pleut, et on a déjà marché une quinzaine de kilomètres, parfois dans l’herbe mouillée. Mais Mme Rod est là, comme si elle nous attendait, nous les inconnus de la ville qui ne la connaissions pas non plus.

– Venez donc vous mettre à l’abri dans la menuiserie! Vous pourrez manger au sec.

C’est ainsi que ça a commencé. Et année après année, la même équipe, ou le temps assurait le remplacement des aines par des forces plus jeunes, a été reçue à Hermenches, non seulement avec une cordialité de bon aloi, un franc sourire, une discrétion exemplaire, mais bientôt avec force thermos de café et vieilles eaux-de-vie. A-t-elle jamais su, Mme Rod, qui nous étions? Son hospitalité, renouvelée jusqu'a l’an dernier, s’accordait avec l’absence de toute présentation. Le nom de Me Regamey lui disait peut-être quelque chose, comme celui du pasteur Hentsch, ou de MM. de Blonay… elle n’en laissait rien paraître.

C’est dans la pittoresque église de Syens que son service funèbre fut célébré, le 23 mars dernier. Tout le monde était la, bien sur, et en particulier non seulement de nombreux patoisants, mais une chorale patoisante. Nous eûmes le plaisir d’entendre un bel hommage en patois et d’apprendre à cette occasion que ? notre Juliette ? avait reçu des patoisants du Cercle de Forel un diplôme d’honneur quelques heures avant sa mort. Le pasteur, inspiré, a médité le fameux texte de l’Ecclésiaste: ? Il y a un temps pour naître et un temps pour mourir, il y a un temps pour aimer et un temps pour haïr… ? Mais Juliette Rod n’a jamais haï personne, sauf peut-être ceux qui n’aiment pas les chevaux, car les chevaux étaient sa passion… avec le patois.

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