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Le contrat de vignolage, une spécificité vaudoise

Pierre-Gabriel Bieri
La Nation n° 2130 30 août 2019

Huitante-deux vignerons-tâcherons de Lavaux et du Chablais se sont avancés dans l’arène lors de la première représentation de la Fête des Vignerons. Six d’entre eux ont été couronnés. Ce couronnement, qui constitue la raison d’être historique de la Fête, récompense ceux qui ont travaillé leur vigne avec le plus de soin, de finesse et de perfection. Il ne s’agit toutefois pas vraiment de «leur» vigne, car le terme de «tâcheron» désigne un vigneron offrant ses services «à la tâche» pour le compte d’un propriétaire viticole qui n’est généralement pas du métier et ne cultive donc pas lui-même sa vigne. On trouve cette configuration dans un certain nombre de domaines familiaux, mais aussi dans les domaines appartenant à des communes, au Canton ou à d’autres collectivités publiques.

La relation entre un propriétaire et son vigneron peut revêtir diverses formes. Le vigneron peut être un employé engagé sur la base d’un contrat de travail et recevant ses ordres du propriétaire. Ce dernier est alors employeur, avec les risques et les lourdeurs administratives que cela peut entraîner. A l’opposé, le vigneron peut être un fermier, c’est-à-dire un locataire qui exploite la vigne comme il l’entend, assume seul le risque économique et paie au propriétaire un fermage. Le statut du vigneron-tâcheron est intermédiaire et original: il permet au vigneron de travailler avec beaucoup d’indépendance tout en bénéficiant d’une rémunération régulière et d’une protection sociale, et au propriétaire de rester étroitement lié à son domaine avec un minimum de contraintes. Cette relation particulière, fondée juridiquement sur un contrat de vignolage, est une spécificité vaudoise.

Selon les termes du contrat de vignolage, le vigneron-tâcheron s’engage à exécuter consciencieusement et à temps tous les travaux de culture et d’entretien dans les vignes qui lui sont confiées. Il se procure lui-même les outils et les machines nécessaires et engage le personnel requis s’il doit se faire remplacer ou lorsque des travaux importants l’exigent. Il peut se charger de la vendange et, selon les cas, de la vinification, voire de la vente de bouteilles au domaine. A la fin de l’année, il adresse au propriétaire un décompte listant et chiffrant les travaux effectués. La rémunération du vigneron-tâcheron comprend un prix de base en fonction de la surface, ainsi qu’une participation au prix de la récolte. Le risque économique est ainsi supporté essentiellement par le propriétaire, mais aussi à titre subsidiaire par le vigneron. Les assurances sociales (fédérales) accordent au vigneron-tâcheron un statut spécial d’«intermédiaire»: il doit verser lui-même la totalité de ses cotisations, en se faisant rembourser la part patronale par le propriétaire.

Il existe actuellement deux contrats-types de vignolage, l’un pour La Côte, l’autre pour Lavaux et le Chablais. Tous deux ont été arrêtés par le Conseil d’État en 1994. Les représentants des vignerons-tâcherons et des propriétaires se rencontrent chaque automne pour négocier l’indexation des prix à la surface et pour faire le point sur les divers aspects de cette forme originale de partenariat, qu’ils apprécient à sa juste valeur et qu’ils souhaitent défendre contre toute tentative de «normalisation».

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