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Les charlistes (scène)

Jacques Perrin
La Nation n° 2010 23 janvier 2015

Tu es Charlie?

 – Je suis Charlie, Monsieur.

– Crayon au poing?

– Crayon au poing.

– Tu as marché dimanche?

 – J’ai marché. Même pas peur.

– Parfait. Pour l’avenir de nos enfants?

– Pour l’avenir de nos enfants, Monsieur, mais j’en ai pas.

– Pas grave, jeune fille, l’essentiel est: pas d’amalgame. Et la vigilance…

– Oui, pas d’amalgame, Monsieur, les amalgames, on les laisse aux populistes.

– … qui récupèrent le combat pour la liberté d’expression.

– … qui récupèrent le combat pour la liberté d’expression, oui Monsieur, oui!

– Comment était l’ambiance au défilé?

– Bon enfant, recueillie. J’ai embrassé Manuel Valls, il est beau, il est sympa!

– Tu apprends vite, jeune fille. Tu as un positionnement citoyen.

– Merci, Monsieur. Nous deux, c’est les valeurs humanistes, Monsieur.

– Et le pays de Voltaire.

– C’est qui Voltaire, Monsieur?

– Un type important pour la tolérance, la démocratie et les droits de l’homme.

– Je me souviens maintenant, il y a des cafés qui s’appellent comme lui, et des magasins de fringues.

– Oui, et un quai, un boulevard aussi, jeune fille. Voltaire faisait souffler le vent des Lumières. Des obscurantistes prétendent qu’il était islamophobe et antisémite. Ne les crois surtout pas, jeune fille!

– Les obscurantistes… C’est clair… Des mecs genre Houellebecq!

– Soupçonné d’islamophobie.

– Genre Zemmour…

– Carrément islamophobe.

– Soral…

– Antisémite fieffé, celui–là!

– Dieudonné…

– Il a la rage!

– Oui, Monsieur, c’est dégueulasse qu’un nè…, pardon un black, déteste les Juifs. Les Juifs, i’s étaient plus en mode souffrance que les blacks. Des losers comme Dieudo, on devrait leur interdire de causer sur les réseaux…

– Attention, jeune fille! Ce faisant, on donne raison aux musulmans radicalisés, aux islamo-fascistes!

– Putain, j’y avais pas pensé. Comment on va s’en sortir? Que dirait-il, notre Charlie?

– A mort les cons! Qu’ils crèvent!

 – Ah quand même… C’est pas bon pour le vivre-ensemble, ça…

– On s’en moque! Charlie ne lâche rien. Nous sommes la civilisation, ils sont les barbares. Je suis Charlie. Tu suis Charlie. Nous suivons tous Charlie!

 (Le monsieur quitte la scène en reniflant dans les coins, suivi comme son ombre par la jeune fille)

– Où es-tu, Charlie? Aide-nous, nous t’obéissons!

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