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Les politiques agricoles cantonales à l’épreuve

Jean-Michel Henny
La Nation n° 2154 31 juillet 2020

C’est le titre d’une récente publication d’Avenir Suisse. Ce document d’une vingtaine de pages semble se référer aux conséquences de la pandémie pour l’agriculture en commençant par vanter les mérites du secteur primaire pendant cette période difficile. En réalité, il s’agit d’une critique des politiques agricoles cantonales et, surtout, de leur coût.

Les dépenses de tous les cantons sont analysées selon un «indice cantonal agricole» qui prend en compte les dépenses par hectare de terre agricole cultivable, par équivalent plein-temps dans l’agriculture, par rapport à la valeur ajoutée brute aux prix de base et par rapport aux transferts fédéraux. La grille d’analyse est souvent incompréhensible. Mais elle permet de distribuer des bons et des mauvais points. Il en ressort que les situations sont fort différentes d’un canton à l’autre, en raison des surfaces cultivables, du nombre d’exploitations et de la qualité de celles-ci. Une petite exploitation viticole de Genève ne générera pas le même revenu à la surface qu’une grande entreprise céréalière du Gros-de-Vaud ou une très intensive culture maraîchère de la Plaine de l’Orbe.

Cette analyse sert en réalité à contester dans son principe le soutien à l’agriculture, que ce soutien émane de la Confédération ou des cantons. Il suffit pour s’en convaincre de lire la liste des cinq pistes pour une «Agriculture à haute valeur ajoutée» en page 16 du document, qui relève du paradoxe aléatoire.

Il faudrait développer une politique agricole plus régionalisée qui s’orienterait vers le marché et profiterait non seulement aux consommateurs mais aussi aux contribuables, ce qui permettrait de réduire progressivement le niveau de soutien. En résumé, il faut réduire les dépenses pour l’agriculture.

Si l’aide à l’agriculture est destinée à l’entretien du paysage, il faudrait changer le mode de subventionnement et confier cette tâche à des entreprises non agricoles, moins coûteuses.

Il faudrait réduire le nombre de règlements entravant la compétitivité des exploitations agricoles, en diminuant la charge administrative des agriculteurs, ce qui accroîtrait leur liberté, renforcerait leur esprit d’entreprise et, indirectement, réduirait le coût pour la Confédération, les cantons et les communes.

L’allègement des charges administratives de l’agriculture permettrait également de démanteler les lourds appareils administratifs cantonaux. A cet égard, réagissant à certaines affirmations d’Avenir Suisse, le conseiller d’Etat Philippe Leuba, en charge de l’agriculture cantonale, relève que l’analyse prend en compte la totalité des 135 postes de la Direction générale de l’agriculture vaudoise alors qu’il faudrait en déduire les 40 postes d’enseignants inclus dans ce chiffre. Etant donné que d’autres cantons n’ont pas d’école d’agriculture, les comparaisons sont faussées.

Enfin, dans la dernière piste explorée, Avenir Suisse annonce clairement la couleur: «Il faudrait discuter ouvertement de la question de savoir si, dans certaines régions, un mode de gestion plus avantageux sur le plan économique ne pourrait pas être utilisé pour lutter contre l’enfrichement. Il existe des méthodes agricoles sans production alimentaire qui entraînent une baisse des coûts pour le contribuable avec le même résultat pour le paysage». En d’autres termes, cessons de soutenir l’agriculture pour produire des denrées alimentaires et importons-les de l’étranger pour favoriser en contrepartie l’exportation de produits manufacturés et de médicaments. C’était la conclusion d’une précédente analyse d’Avenir Suisse intitulée «Une politique agricole d’avenir» dont il a été question dans ce journal.

Nous prenons conscience aujourd’hui plus que jamais que la production de denrées alimentaires indigènes est essentielle, voire vitale. Compte tenu de notre niveau de vie et des coûts de production plus élevés qu’à l’étranger, un soutien important à l’agriculture helvétique s’impose, malgré les analyses pseudo-scientifiques soutenues par les entreprises qui subsidient ce genre de publication.

Merci à Avenir Suisse de nous permettre régulièrement de rappeler ces évidences.

Notes

1  On peut consulter le document sur le site www.avenir-suisse.ch.

2  La Nation n° 2107 du 12 octobre 2018.

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