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Actualités  |  Mardi 30 avril 2019

L’engrenage sans fin du droit évolutif

En juin 2005 le peuple suisse a accepté notre participation à l’«espace Schengen». L’objectif explicite était de mieux gérer les flux migratoires et d’améliorer la collaboration transfrontalière dans la poursuite des délinquants. Il ne s’agissait vraiment pas de la gestion administrative des armes semi-automatiques! Le Conseil fédéral avait même affirmé que cette question ne serait pas touchée par l’accord.

Aujourd’hui, on nous met en demeure de voter la reprise, formulée en droit suisse, de la directive européenne sur les armes. Pour nous forcer la main, on nous menace d’une exclusion de Schengen en cas de refus. C’est un engrenage sans fin: chaque accord que nous signons est un pas en direction de l’accord suivant… et un moyen de pression supplémentaire pour nous le faire signer.

On comprend bien qu’un traité doive être mis à jour périodiquement. La réalité politique évolue, les données chiffrées changent, un membre se retire, un autre apparaît. L’accord n’est plus entièrement pertinent. Une mise à jour est alors nécessaire. C’est normal, pour autant que la mise à jour soit conçue dans le cadre strict de l’engagement d’origine.

Ce n’est pas le cas en l’occurrence. La directive sur les armes est un autre sujet. Elle a des incidences sur des domaines qui n’ont rien à voir avec Schengen. Les responsables fédéraux et cantonaux de nos nombreuses activités de tir jugent que la nouvelle loi les entraverait déraisonnablement. En ce sens, et quoi qu’on en pense sur le fond, la directive aurait dû faire l’objet d’un accord distinct qui nous aurait dispensés de subir ces menaces disproportionnées.

C’est le problème qui se pose avec le «droit évolutif» propre à l’Union européenne: on accepte une enveloppe avec un contenu précis, et on néglige le fait qu’on s’engage du même coup à accepter tout ce qu’on y mettra après coup, même ce qui n’a rien à y faire, même ce qui est contraire à nos intérêts.

Depuis toujours, la politique générale de l’Union européenne est portée par un mouvement d’alignement, de centralisation et d’unification. L’Union est un pouvoir administratif qui tend en permanence à se constituer en Etat politique tout en réduisant la souveraineté des nations qui la constituent. Ça se passe un peu comme avec la centralisation fédérale au détriment des Etats cantonaux, sauf que nous ne faisons pas partie de l’Union, et sauf que la Confédération est tout de même plus qu’un pouvoir administratif, et sauf que l’Union ne connaît pas les contre-pouvoirs du fédéralisme et de la démocratie directe.

Nos autorités sont imbues du préjugé que nous ferons tôt ou tard partie de l’Union. Cela les fait parfois oublier, face à l’Union européenne, que la Suisse est un Etat souverain. En refusant la loi sur les armes, le 19 mai, les électeurs le lui rappelleront.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 30 avril 2019)