De belles victoires, mais…

On ne va pas se plaindre. Le 28 septembre déjà, le comité composé du PLR, de l’UDC et de la Ligue vaudoise avait remporté une première victoire contre la facilitation du droit de vote des étrangers au niveau communal.

Le 30 novembre, la campagne contre le bricolage du droit de vote cantonal s’est terminée sur une victoire complète pour le comité. Sa stratégie avait consisté à concevoir la campagne en vue du 28 septembre aussi comme une précampagne pour le 30 novembre. La Ligue vaudoise regrette que seulement 36% des Vaudois l’aient suivie contre la création du statut électoral de Vaudois de l’étranger. Nous étions seuls à combattre cette confusion des corps électoraux du Conseil national et du Conseil des Etats. Ce résultat reste toutefois bien moins désastreux qu’il ne l’est pour l’initiative en faveur d’un service citoyen, balayée par 87% des Vaudois.

En deux mois, le Conseil d’Etat et le Parlement ont lourdement perdu sur deux objets qu’ils soutenaient. La campagne du gouvernement fut pour le moins timide. Contre le droit de vote cantonal des étrangers, le comité n’a pu compter sur aucun soutien de sa part. Mme Gorrite, qui avait hérité du dossier à la suite de la réorganisation des dicastères, n’a visiblement pas souhaité aller contre les consignes de son parti. La majorité aurait pourtant pu le lui imposer.

Aujourd’hui encore, il nous paraît hallucinant que nos autorités aient proposé de donner automatiquement le droit de vote aux personnes sous curatelle et durablement incapables de discernement. L’incohérence des deux statuts de citoyen et d’incapable nous paraissait impossible à réconcilier par une simple règle générale, le cas par cas étant d’ailleurs déjà possible. Le collège craignait-il une défaite dans les urnes face à un milieu associatif qui n’a pas hésité à jouer sur tout le registre du pathétique? Le rejet du texte à 73% démontre que seules les franges les plus égalitaristes de la population l’ont soutenu.

Ces franges, nous les retrouvons derrière la minorité vaudoise de 29% qui a accepté l’initiative des jeunes socialistes sur l’impôt successoral. Elle atteste de la persistance dans le Canton d’une gauche très idéologique, mais solidement implantée. Cela promet un résultat très serré dans le cadre de la campagne sur l’initiative des milieux économiques pour 12% de baisse d’impôts.

Enfin, le très net refus du service citoyen contraste avec le dynamisme affiché de son comité de campagne. Les initiants parvinrent, durant huit ans, à donner de leur action une image à la fois progressiste, jeune, urbaine et branchée. Leur esthétique, qu’il s’agisse de leur logo ou de la palette de leurs couleurs, rappelait très fortement celle du mouvement Opération Libero. La doctrine des deux mouvements, centrée autour de la notion d’ouverture – selon les sujets, à l’Europe, aux étrangers, aux femmes – mêle libéralisme philosophique et étatisme. Ce positionnement, dans le cadre du service citoyen, a eu pour effet de leur aliéner l’ensemble du spectre politique. Les égalitaristes contestaient l’imposition aux femmes d’une nouvelle obligation, les libéraux l’étatisme du projet, et les conservateurs sa dévalorisation de la défense nationale. C’est une leçon pour les mouvements ou opérations hors-sols, dont l’action, même dans la longue durée, se centre sur une idée ou une perspective unique: le service citoyen dimanche dernier, le ressassement anti-UDC du 9 février 2014 dans le cas d’Opération Libero.

Pour la Ligue vaudoise, l’année 2025 fut riche d’engagements couronnés de succès: de l’avant-projet de loi sur les communes, heureusement schubladisé, au bricolage du droit de vote, abattu dans les urnes. 2026 sera une année plus fédérale. Son enjeu central sera institutionnel et fédéraliste: la soumission à la double-majorité du paquet d’accords avec l’Union européenne. De belles victoires… mais le combat continue.