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Le rôle des associations professionnelles

Lionel Hort
La Nation n° 2148 8 mai 2020

Le virus couronné aura eu pour effet, momentanément, de suspendre l’activité des Chambres fédérales et des parlements cantonaux. Les mesures sanitaires de l’OFSP, qui ne semblaient pourtant pas devoir concerner l’exercice des droits politiques, ont pourtant de facto mis un terme précoce à la dernière session parlementaire fédérale. Lundi 4 mai, le Conseil national a repris du service, pour une session extraordinaire consacrée exclusivement à la crise sanitaire. Le fait que l’organisation de cette session ait dépendu de la confirmation par le gouvernement fédéral qu’il ne s’agissait pas d’un «rassemblement» de plus de 5 personnes1 a quelque chose de troublant.

En temps normal et selon la conception moderne de l’Etat, le rôle premier du Parlement est de contrôler l’activité du gouvernement, ce qui le place au-dessus de lui en termes constitutionnels. Son second rôle est d’être comme un grand forum dans lequel les principales orientations politiques sont confrontées et débattues par les élus. D’après les principes de la démocratie représentative, ceux-ci, au travers des partis dont ils sont issus, sont censés refléter le plus exactement possible la diversité de la société.

La conception sous-jacente au système représentatif est individualiste: il n’y aurait essentiellement dans la société que l’Etat et les individus, rien de plus. Chaque élu est légitimé à siéger par le seul nombre de voix qu’il a obtenu lors de son élection. Cette conception omet la dimension qualitative et vivante des communautés humaines intermédiaires qui composent la nation, à commencer par les familles, les paroisses, les entreprises, les syndicats et les associations professionnelles.

La crise du Covid-19 et la mise entre parenthèses forcée des parlements ont donné pendant quelques semaines un rôle accru aux associations économiques dans la représentation des intérêts divers de la société auprès d’un Conseil fédéral doté des pleins pouvoirs. Tant les associations patronales que les syndicats ont continué à exprimer les préoccupations nombreuses et variées de leurs membres, établissant ainsi un lien extra-parlementaire entre l’Etat et l’économie. Ces institutions ont pour ainsi dire temporairement pallié l’inaction des Chambres fédérales et des parlements cantonaux en tant qu’interlocuteurs de l’exécutif – les jeux partisans en moins.

Ce faisant, les diverses associations économiques ont certainement contribué à la mise en place du difficile plan de sortie du semi-confinement. Une fois le cadre fixé et communiqué par le Conseil fédéral, il a été frappant de constater comment les différentes associations professionnelles – dentistes, coiffeurs ou détaillants – ont développé leurs propres consignes, adaptées aux diverses réalités cantonales et inspirées par une connaissance du terrain, et les ont diffusées auprès de leurs membres.

Ces institutions ont également été des interlocuteurs dans l’élaboration et la mise en œuvre des mesures d’aide, rendues indispensables par le caractère général de la crise. Elles ont aussi lancé des initiatives pour répondre aux besoins de leurs membres confrontés soudainement à des situations d’urgence. On peut à cet égard mentionner l’action concertée de GastroVaud, des associations de bailleurs et de l’Etat de Vaud dans le plan d’aide aux restaurateurs.

Cette collaboration pourrait sans doute utilement se prolonger, au travers des mécanismes du partenariat social ou des relations tripartites, pour la gestion des conséquences économiques de la pandémie qui s’annoncent d’ores et déjà sévères.

La situation que nous vivons actuellement illustre la vitalité des corps intermédiaires, notamment dans le domaine économique, leur sens des responsabilités envers leurs membres, et finalement une forme de résilience par rapport aux tendances dissolvantes de l’individualisme contemporain comme de l’étatisme centralisateur. C’est heureux et, en ces temps troublés, un signe d’optimisme pour la force et la cohésion du Pays.

Notes:

1  Cf. l’entretien de Mme Isabelle Moret, présidente du Conseil national, diffusé par Le Matin Dimanche du 29 mars 2020.

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