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Nouvelles de la cyberadministration fédérale

Marc-Olivier Busslinger
La Nation n° 2174 7 mai 2021

La cyberadministration (ou eGovernment selon la terminologie utilisée outre-Sarine) regroupe l’utilisation de moyens informatiques au sein des administrations publiques. Ceux-ci visent à traiter des informations et des données à l’interne des services de l’Etat ou à communiquer et traiter les demandes des administrés de manière plus simple, rapide et efficace, quels que soient le niveau étatique et les autorités concernées.

A la suite des évolutions technologiques, il semblait normal que les services publics suivent le mouvement et se modernisent. La cyberadministration constitue un des domaines qui promet, depuis déjà près de vingt ans, de transformer radicalement les relations entre les citoyens et leurs administrations. En numérisant les services publics, on cherche à gagner en efficacité, en rapidité et à diminuer la charge administrative au sein des services étatiques. Il s’agit de créer de nouveaux moyens d’accès, d’information et de communication par le biais de plateformes numériques dédiées. Tous les domaines de l’activité étatique sont concernés. On trouve au niveau fédéral notamment des projets en matière de justice (justitia.swiss), de publication numérique des normes (fedlex.admin.ch), un portail pour les entreprises (easygov.swiss), pour le service des douanes (e-dec) ou à disposition des habitants avec une plateforme d’annonce des déménagements (eumzug.swiss). Ces plateformes se basent sur des législations fédérales topiques préexistantes ou ont été créées en adaptant, petit à petit, des législations spécifiques aux différents domaines du droit concernés. Les cantons ne sont pas non plus en reste et développent de nombreux projets et initiatives.

Un avant-projet de loi fédérale, la LMETA (loi fédérale sur l’utilisation des moyens électroniques pour l’exécution des tâches des autorités), a récemment été soumis à consultation. Cette loi tend à permettre à la Confédération de numériser tous types de services administratifs fédéraux, de conclure des conventions avec des organismes tiers et de leur déléguer certaines tâches. Elle autorise également la Confédération à financer ou à prendre des participations financières dans de tels organismes, le tout en encourageant l’utilisation de logiciels à code source ouvert1 et la publication de données anonymisées en «openData». En sus de ces éléments, qui concernent principalement l’administration fédérale, cette législation devrait permettre à la Confédération d’ «imposer l’utilisation des services administratifs en ligne» aux cantons ou aux communes (art. 12 al. 3) et de leur imposer des «normes techniques, organisationnelles et de procédure» (art 13 al. 1) dans la mesure où ces éléments seraient nécessaires à «l’application uniforme et correcte du droit fédéral».

Ce projet a soulevé diverses critiques dont nous rapportons ici les principales:

– un manque de compétences constitutionnelles, la Confédération ne disposant pas de la compétence d’imposer des normes techniques, organisationnelles ou de procédures dans les domaines dans lesquels elle ne dispose pas de compétences explicites;

– le non-respect de la nécessité, même dans le cadre du fédéralisme d’exécution, de laisser de réelles autonomies aux cantons et aux communes et de leur permettre ainsi d’innover afin de répondre au mieux aux besoins de leurs populations;

– une contractualisation du droit public et une perte de contrôle politique sur les nouvelles organisations créées spécifiquement pour la mise en place de ces plateformes informatiques, des organismes qui semblent agir hors du contrôle politique du Parlement.

Enfin, le projet de LMETA crée un important flou administratif. Ces plateformes brouillent parfois la visibilité sur les responsabilités des différents services administratifs concernés. Le citoyen risque de ne plus forcément être capable de comprendre auprès de quel service il effectue ses démarches administratives, ni auprès de quelle autorité il doit se tourner en cas de problème. Une évolution qui risque d’entamer la confiance qu’il place en ses autorités, en donnant à celles-ci un monolithique visage froid et distant.

Les fortes critiques émises par les cantons romands dans leurs réponses nous laissent espérer que les futurs développements de ce domaine se feront dans le respect de la répartition constitutionnelle des compétences et dans le respect des autonomies cantonales et communales. Les liens entre les administrés et leurs autorités méritent selon nous d’être choyés, pas d’être trop rapidement sacrifiés sur l’autel de l’efficacité.

Notes:

1  Logiciels Opensource – donc permettant la réutilisation et la modification successive des logiciels créés au profit des autorités.

Réponse à la consultation

La Ligue vaudoise a jugé nécessaire de donner également de la voix contre ce projet de LMETA. Aussi a-t-elle, dans le délai de consultation, également adressé au Conseil fédéral son avis sur le projet de loi. Elle a invité le Conseil fédéral à renoncer au projet et à mieux préserver les souverainetés cantonales.

Le texte de notre réponse à la consultation fédérale est disponible à l’adresse: www.ligue-vaudoise.ch/actualites/496 

Réd.

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