Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Ouvrez les portes!

Olivier DelacrétazEditorial
La Nation n° 2149 22 mai 2020

Depuis le 11 mai, les magasins, les restaurants, les bars, les musées et les bibliothèques, les fitness et les plages ont reçu l’autorisation fédérale d’ouvrir. Les transports publics circulent à peu près normalement. Même les vieux, ces vieux à risques, ont reçu une autorisation de sortie. Mais les églises continuent d’être fermées le dimanche. Certes, les pasteurs ne sont pas inactifs. Ils correspondent, visitent les malades, président les services funèbres. Nous recevons, du nôtre ou de ses collègues, des prédications écrites ou sous forme audio, avec lectures et prières. Tel pasteur envoie de courts messages en vidéo drôles et percutants qui courent les réseaux sociaux. Plusieurs églises sont ouvertes tous les matins et jusqu’au soir, à la disposition de qui veut se recueillir… Mais pas de culte le dimanche matin. Pâques s’est passée à la maison.

Le bon à tirer de cette Nation ayant été donné il y a trois jours, nous ne savons pas ce qu’il en aura été de l’Ascension. Nous serions étonné autant qu’enchanté que notre article enfonce des portes rouvertes.

Pratiquement, une célébration communautaire présente moins de problèmes qu’une course en bus aux heures de pointe. Le récent enterrement d’une cousine nous a convaincu qu’un culte pouvait parfaitement être célébré, moyennant quelques précautions qui ne diffèrent en rien de celles que nous observons dans les grandes surfaces, et qui sont d’ailleurs déjà entrées dans les mœurs: discipline et lenteur, distance, masques et lavage des mains. La sainte Cène et l’Eucharistie demandent sans doute des précautions supplémentaires, mais les responsables des Eglises sont capables de décider eux-mêmes ce qu’ils peuvent faire et ce qui n’est pas possible. Que la Confédération arrête de s’occuper de tout dans tous les détails!

Les premiers mots de la Constitution suisse «Au nom de Dieu tout-puissant» sont-ils purement déclamatoires? Car c’est en vain que les Eglises, tant du côté catholique que du côté protestant, sont intervenues auprès des autorités fédérales. Il est bien possible qu’elles se soient contentées de demander poliment la permission alors qu’il s’agissait de se battre pour faire comprendre la nécessité impérieuse de rouvrir les églises et pour défendre leur droit à exercer pleinement leur ministère. Les associations professionnelles, les grandes surfaces et les représentants des personnes âgées l’ont compris. Leurs interventions énergiques et répétées, parfois indignées, ont payé.

En principe, les maîtres de la manœuvre fédérale nous ferons part de leurs dernières décisions le mercredi 27 mai. La mise en œuvre suivra le lundi 8 juin, ce qui repousse l’éventuel premier culte public au dimanche 14. De la sorte, Pentecôte, qui aura lieu le 31 mai, est condamnée à se fêter en privé.

C’est à raison qu’on a imposé aux Suisses un confinement modéré, de façon à tenir compte de leurs besoins primordiaux, gagner leur vie autant que possible, manger, être soignés. C’est à raison encore qu’on a élargi les autorisations au besoin de se cultiver, de faire du sport, de sortir et de rencontrer du monde. Mais c’est à tort qu’on néglige les besoins religieux de la population.

Qu’on ne nous réponde pas qu’on peut très bien pratiquer sa religion à la maison. L’Église, ecclesia, est une assemblée: le culte est par essence un acte communautaire, l’acte des fidèles communiant ensemble avec le Christ. Le culte personnel est un prolongement du culte de la communauté, non un remplacement.

L’Eglise n’est pas là pour ses seuls membres. Elle intercède pour tous, pour les autorités, pour ceux qui travaillent, pour les pauvres et les malades, pour les absents. La cloche dominicale qu’entendent ces derniers leur rappelle que, même au fond de leur lit, ils ne sont pas absents des préoccupations des fidèles. Le ministère de l’Eglise participe du bien commun.

Nous vivons ces temps-ci sous un régime d’exception. Cela nous prive de plusieurs libertés essentielles. Nous l’acceptons par souci de l’intérêt général, mais dans l’idée d’un retour aussi rapide que possible au régime ordinaire; dans l’idée aussi que seules sont légitimes les restrictions indispensables. Avec ce que l’on sait de l’épidémie, l’interdiction des cultes n’en fait plus partie. D’ailleurs nous venons d’apprendre que dans la très laïque France, le Conseil d’Etat, haute cour administrative, vient d’intimer l’ordre au Gouvernement de lever l’interdiction absolue de réunion dans les lieux de culte.

Les relations excellentes que l’Eglise entretient depuis si longtemps avec l’Etat de Vaud, le fait aussi que les questions religieuses relèvent de la compétence des cantons, font un devoir au Gouvernement vaudois d’intervenir dans ce sens auprès de la Confédération.

Pentecôte est la manifestation par excellence de l’ouverture de l’Eglise chrétienne à toutes les nations. Qu’elle soit aussi, cette année, celle de la réouverture de nos églises à toute la population!

Notes:

1  «Le juge des référés du Conseil d’État ordonne au Gouvernement de lever l’interdiction générale et absolue de réunion dans les lieux de culte et d’édicter à sa place des mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires et appropriées en ce début de “déconfinement”».

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: