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Actualités  |  Mardi 27 août 2013

Menace sur les Eglises réformées cantonales

La Fédération des Eglises protestantes de Suisse (FEPS) désire renforcer son influence en prenant la forme d'une Eglise suisse qui chapeauterait les Eglises cantonales.

Pour ne pas effrayer le bon peuple, on ne parle pas de centralisation, mais de «communion d'Eglises». Il s'agit d'être «plus forts ensemble», de susciter «davantage d'engagement», de «parler d'une seule voix», d'être «plus visible», «d'être une partenaire fiable pour les autorités fédérales, les institutions nationales et les organisations internationales». On parle d'«unité dans la diversité», on annonce un «large débat». Le paquet est bien emballé, bien ficelé, déjà timbré. Que contient-il?

On nous propose un Synode (élu par les synodes cantonaux) chargé d'unifier les positions des Eglises cantonales quant aux «défis du moment», un Conseil de neuf membres, responsable des aspects juridiques, administratifs et stratégiques, et un président qui «représente l'Eglise protestante en Suisse de manière générale, à l'interne et vis-à-vis de l'extérieur».

Ces trois autorités sont censées fonctionner sur un pied d'égalité. Napoléon disait qu'«un mauvais général vaut mieux que deux bons.» Qu'aurait-il dit de trois?

En réalité, le président, plus mobile, détenteur d'une compétence générale qui lui donnerait toute latitude d'intervenir publiquement, serait le maître du jeu. Ses déclarations engageraient officiellement l'ensemble des réformés suisses aux yeux des pouvoirs politiques et médiatiques.

Il s'agit d'un bouleversement des structures des Eglises cantonales. Il s'agit aussi d'une négation de la réalité profonde de chacune d'entre elles, réalité résultant de son histoire particulière et justifiant son statut. C'est une révolution qu'on nous propose, et conduite au pas de charge: la nouvelle organisation est censée entrer en vigueur le 1er janvier 2016.

Certains fidèles déçus par l'une ou l'autre résolution récente du Synode vaudois imaginent peut-être qu'une Eglise protestante suisse les protègerait mieux contre les dérives. Il suffit de lire les diverses prises de position de la FEPS pour se rendre compte qu'il n'en sera rien. Mais l'important est ailleurs. L'important est dans le fait qu'une résolution prise sur le plan fédéral échapperait à tout jamais aux Eglises cantonales et à leurs paroisses.

La délimitation délibérément floue des compétences de l'«Eglise protestante en Suisse», l'importance du rôle de son président, l'absence d'un droit de référendum, tout cela induirait nécessairement un gonflement continu de sa sphère d'intervention, sans même qu'il soit besoin de modifier les textes.

Le débat public se termine le 30 novembre. Mais à quoi sert de discuter sur les détails? Même fortement remanié, le projet de la FEPS impliquera forcément une réduction drastique de l'autonomie des Eglises cantonales. C'est le principe même qu'il faut refuser.

(Olivier Delacrétaz, 24 heures, 27 août 2013)