Les anges dans nos campagnes

Le Bureau de prévention des accidents (BPA) a trouvé une nouvelle idée diabolique pour vilipender le plaisir de conduire: de vieux hippies barbus déguisés en anges ont été engagés pour interpeler les automobilistes et leur expliquer – en anglais exclusivement – qu'on ne peut être heureux qu’en roulant tout-dou-tout-dou-ce-ment, en souriant bêtement et en dodelinant mollement de la tête. On peut les voir dans des publicités à la télévision, avec un pseudo-automobiliste qui accepte de leur faire risette devant les caméras et de rouler en leur compagnie à la vitesse d'un escargot unijambiste grièvement blessé. Il paraît qu'on peut aussi croiser ces drôles de volatiles au bord des routes du canton de Fribourg, où ils font de grands signes aux conducteurs susceptibles de rouler à la vitesse autorisée – c’est-à-dire beaucoup trop vite selon la pensée écologiste dominante.

Est-ce efficace en matière de prévention?

Autrefois, on mettait au bord des routes des policiers. Parfois des silhouettes de policiers en carton. C'était suffisamment dissuasif et les conducteurs levaient le pied. Aujourd'hui, les agressions sont devenues plus nombreuses que les accidents; la police n’a plus le temps de se montrer simplement au bord de la route et se contente de quelques opérations coups de poing; la répression des infractions routières est devenue lourde et pusillanime et les juges fédéraux prennent un malsain plaisir à en rajouter; le discours officiel affirme néanmoins que la mode du «tout répressif» est révolue; on veut que le conducteur «découvre par lui-même» les bienfaits supposés de la conduite pépère; on met donc sur son chemin des anges qui ne sont pas des messagers du Ciel mais de l’administration fédérale. Résultat: lorsqu'on aperçoit l'un de ces babas cool hirsutes en robe de chambre et sandales en train d'agiter un panneau «Slow down», on n'a qu'une envie: mettre rageusement des gaz et lui foncer dessus, avec le secret espoir d'emporter une ou deux plumes accrochées à un essuie-glace, comme un trophée: «Vous voyez: j'en ai eu un!» Ensuite, on se sent rasséréné, heureux, et on poursuit sa route calmement.

Cette campagne est donc excellente pour la sécurité routière.