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Se préparer au krach?

David Verdan
La Nation n° 2208 26 août 2022

Michaël Burry est un investisseur et gérant de fonds devenu mondialement connu pour avoir anticipé la crise des subprimes de 2008. Contrairement à nombre de ses homologues, cet habile gestionnaire avait eu le souci de vérifier la composition des petits pains que s’arrachaient tous les investisseurs de cette période: les subprimes mortages. Convaincu de leur état de pourriture avancé, Burry se résolut alors à shorter (i.e. parier à la baisse) le marché immobilier américain que l’achat abusif de créances titrisées avait transformé en bulle spéculative irrécupérable à ses yeux. Durant près d’un an et demi, Burry dut se battre contre ses clients qui, considérant que le marché immobilier américain était insubmersible (comme le fameux paquebot), le prirent littéralement pour un fou.

Comme nous le savons tous a posteriori, le krach finit bien par arriver, jetant à la rue des millions d’Américains et ruinant l’économie de nombreux pays. De leur côté, Michaël Burry et ses clients virent leur portefeuille s’engraisser de plus d’un milliard de dollars… de quoi racheter un marché immobilier exsangue.

Mais pourquoi donc ce retour aux événements de 2007-2008? Eh bien, parce que notre avisé Mister Burry a remis ça en prenant en cette année 2022 d’importantes positions de short. Sur son compte Twitter – subtilement nommé Cassandra –, il s’en est expliqué en déclarant que nous vivions actuellement «la plus grande bulle spéculative de l’histoire» et que celle-ci nous menait vers «la mère de toutes les crises». Rien que ça…

Mais doit-on réellement prendre au sérieux cet oiseau de malheur pour la simple raison qu’il aurait anticipé une crise quinze ans auparavant? Ne s’est-il d’ailleurs pas fait remarquer entre-temps par de nombreuses prédictions apocalyptiques et des tweets emportés puis rapidement supprimés? En somme, le marché actuel n’est-il pas plus résilient que ne le pense Michaël Burry?

Malheureusement, ce n’est pas non plus ce que semblent penser d’autres acteurs majeurs de la finance qui rejoignent plutôt Burry dans ses prédictions. Le PDG de JPMorgan, par exemple, exhorte à se préparer à un «ouragan» économique à venir. Le milliardaire Ray Dalio a, quant à lui, dévoilé des positions de short pour un total dépassant 10 milliards de dollars (!) sur le seul marché européen. C’est dire ce que pensent les Américains de la situation économique du vieux continent.

Plus pessimiste encore, le très influent et médiatique Robert Kiyosaki, pour répondre à sa communauté lui demandant quel était le meilleur investissement pour traverser la période d’inflation actuelle, a récemment tweeté: «Les boîtes de thon et de haricots!» Pour lui, même les obligations d’Etat – le type de placement considéré comme le plus sûr pour l’épargne et les caisses de pensions – étaient sur le point de s’effondrer… Et c’est ce qui semble arriver actuellement. Le 19 juillet dernier, la prestigieuse Banque Transatlantique publiait une capsule vidéo intitulée «Sommes-nous en train de vivre un krach obligataire?» avec une conclusion claire: «Oui, cela ressemble bien à un krach obligataire.»

Couplée à la crise énergétique européenne et à la crise mondiale des chaînes d’approvisionnement, cette menace nous promet un hiver des plus tendus. Il serait donc prudent de s’y préparer, mais également d’anticiper les troubles qui s’ensuivront. Chaque crise est également une occasion. Celle-ci pourrait permettre de raffermir notre tissu économique régional, de restaurer notre souveraineté énergétique et de ressouder les communautés nationales. Rappelons l’ingéniosité des entrepreneurs bâlois qui, suite aux dégâts de la crise de 1929, créèrent la banque et le réseau WIR qui soutint largement la relance des PME helvétiques. Inspirons-nous-en et d’ici là… achetons des boîtes de thon!

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