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Le rôle du préfet

Olivier Klunge
La Nation n° 1901 5 novembre 2010
L’édition de La Liberté du 15 octobre dernier nous apprend que, dans la Broye, le préfet vaudois (bientôt retraité et peut-être candidat à la municipalité de Payerne) André Cornamusaz et le préfet fribourgeois (bientôt soumis à réélection) Christophe Chardonnens ont proposé aux Conseils d’Etat des deux cantons de ne nommer plus qu’un seul préfet pour la Broye. L’idée est de «favoriser des projets d’envergure», «d’être le moteur d’une région, pas quelqu’un qui s’englue dans les tâches administratives».

Passons sur cette vision étatiste de la société qui croit que seul le pouvoir politique doit indiquer la voie et peut faire prospérer une région et revenons au rôle réel du préfet au-delà des discours ronflants et «ébouriffants».

Inspiré par l’organisation napoléonienne (voire par les baillis de l’Ancien Régime), le préfet est le représentant de l’Etat, plus précisément de son gouvernement, sur l’ensemble de son territoire divisé en départements chez nos voisins grévistes, en districts chez nous. Le préfet est nanti des pouvoirs que lui délègue l’Etat. Dans le Canton de Vaud, il est chargé de l’exécution des décisions du Conseil d’Etat, de la surveillance des communes et de l’installation de leurs autorités, ainsi que de celle des magistrats et autres agents du district, de la délivrance d’autorisations, permis, licences et autres documents officiels prévus par les lois (et même à Fribourg des permis de construire) et de la présidence de commissions d’apprentissage.

Il est aussi très intéressant de noter que, si le Conseil d’Etat a perdu aujourd’hui la plupart de ses pouvoirs judiciaires, le préfet les a conservés. Il est ainsi président de la commission de conciliation en matière de baux; il doit surveiller l’organisation et le déroulement des votations et élections, enfin il est le juge de première instance dans les cas de contraventions et de certains délits passibles d’amendes.

Le préfet joue aussi un rôle de conseiller pour les autorités communales qui apprécient de s’appuyer sur ses conseils et sa médiation, par exemple lors de séances houleuses du parlement communal.

Enfin, le préfet est aussi l’oreille de l’Etat dans les districts. Il est donc naturellement amené à parfois relayer les préoccupations de sa région auprès du pouvoir central (dont l’éloignement des préoccupations n’est pas toujours proportionnel à la distance géographique…). Ce rôle est sans doute plus fort encore dans le Canton de Fribourg où le préfet est élu au suffrage universel et doit donc prouver à ses administrés-électeurs qu’il est «proche des gens».

Nous nous réjouissons que l’amour des structures parfaites sur le papier et du centralisme égalisateur qui caractérise nos Etats démocratiques (engluant fonctionnaires et population dans les tâches administratives) accepte de s’incliner parfois devant les réalités diverses de régions périphériques (gymnase et hôpital intercantonal dans la Broye, collaborations entre les communes de Lavey-Morcles et de St-Maurice…). Il ne s’agit cependant pas de cela ici. Le rôle du préfet ne relève pas du service public mais de l’autorité, de la puissance étatique, dont il est l’image dans son district. Si un canton peut déléguer à un autre, voire à une entreprise privée, la desserte scolaire ou médicale d’une région dans un souci d’efficacité, il ne peut déléguer l’exercice de la justice ou de la force publique qui constitue le coeur même de sa raison d’être.

Les Conseils d’Etat vaudois et fribourgeois ne s’y sont d’ailleurs pas trompés en rejetant sèchement cette proposition démagogique de leurs subordonnés.

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