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Après la suppression des filières, le cycle unique

Olivier Delacrétaz
La Nation n° 1916 3 juin 2011
Il y a deux décisions que les réformateurs scolaires ne supportent plus de devoir prendre: les décisions d’orientation et les décisions de promotion.

L’orientation est un problème horizontal: arrivant à la fin de la sixième année, l’élève doit-il emprunter la voie de droite, celle du milieu ou celle de gauche? Le risque est trop grand de commettre une injustice à son égard, de l’orienter avant qu’il ait pu développer ses qualités réelles et surtout de l’empêcher de suivre des études longues alors qu’il en serait éventuellement capable.

La solution des réformateurs consiste à supprimer le choix, en d’autres termes à introduire la voie unique jusqu’en neuvième année. S’il n’y a plus de filières distinctes, en effet, il n’y a plus d’orientation, donc plus de décision d’orientation, donc plus de contestation par les parents desdites décisions, donc soulagement et confort pour tous. Ils règlent le problème en le supprimant.

Nous avions déjà dénoncé ce procédé. Il nous a fallu plus de temps pour nous rendre compte que les réformateurs ne sont pas moins actifs et imaginatifs dans le traitement, c’est-à-dire la suppression, du problème de la promotion des élèves. Ce problème-là est vertical: l’élève peut-il monter ou doit-il refaire son année? Là aussi, pense le réformateur, l’injustice menace au-delà de ce que l’humain peut supporter. Et puis, l’échec de l’élève, c’est l’échec de l’Ecole, des maîtres, des méthodes, de la HEP.

La solution consiste à remplacer les périodes annuelles par des périodes plus longues appelées cycles. Ce n’est pas une nouveauté. Actuellement déjà, jusqu’en septième année, l’enseignement est structuré en quatre cycles de deux ans (un cycle pour l’école enfantine, deux pour l’école primaire et un pour l’école secondaire). La question de la promotion ne se pose plus à la fin de chaque année, mais uniquement à la fin de chaque cycle. on divise donc par deux le nombre de décisions de promotion. Mais pour ceux qui n’aiment pas ça, c’est encore beaucoup. Et pour les réformateurs, qui sont des gens à principes (des principes faux, mais c’est une autre question), c’est inacceptable.

Qu’à cela ne tienne, on va augmenter la durée des cycles (et du même coup réduire leur nombre)! Au moment où EVM a cassé le rythme annuel, qui calquait tout naturellement l’année scolaire sur le déroulement des saisons et des fêtes religieuses et profanes, et cassé du même coup le frein du réalisme et du bon sens, n’importe quel bricolage devenait possible.

C’est ainsi que le projet de Mme Lyon introduit des cycles de quatre ans: quatre ans sans promotion! Nouvelle réduction des décisions à prendre… et donc des injustices à risquer, et donc des nuits blanches à passer en se disant que peut-être on aurait dû donner sa chance à l’élève recalé en le faisant passer, ou, pourquoi pas, qu’on aurait pu donner sa chance à un élève en le faisant redoubler au lieu de le promouvoir malgré ses connaissances notoirement insuffisantes.

Le système «LEO III», celui qu’étudie présentement le Grand Conseil, ne laisserait plus que deux décisions de promotion à prendre, l’une à la fin de la deuxième année primaire, l’autre à la fin de la sixième. C’est à la fois mieux et pire pour le réformateur. Car moins il y en a, de ces occasions de promotion, et plus elles apparaissent dans toute leur potentialité d’injustice.

Il faudra faire le pas de plus, et compléter tout logiquement la création d’une voie unique par la suppression de la multiplicité des cycles au profit d’un cycle unique. Nous n’inventons rien. C’est la grande idée de la suppression du redoublement défendue par Mme Lyon dans son premier projet.

La réforme s’achemine peu à peu vers un système de filière unique dans un cycle unique. Il faut l’imaginer comme une grande pétuffle spatio-temporelle qui réunira tous les élèves de quatre à quinze ans dans une commune stabulation libre.

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