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Un peintre vaudois à l’honneur au Château de Morges

Claire-Marie Lomenech
La Nation n° 1928 18 novembre 2011
Il est des trésors qu’on ignore trop longtemps et qui soudain ressurgissent, nous surprennent et nous saisissent. Si le «peintre du silence» Henry Meylan (1895-1980), actuellement exposé au Musée Militaire Vaudois, mérite de voir son oeuvre ainsi qualifiée, ce n’est que rendre hommage à celui qui a peint son siècle.

La jeune commissaire de l’exposition, Noémie Weissbrodt, s’est plongée dans la diversité de l’oeuvre du peintre vaudois, né au Sentier à la fin du XIXe siècle. Le MMV possède plus de deux mille dessins d’Henry Meylan, dont une partie offerte par le peintre de son vivant en 1973, à la suite d’une exposition-vente au Château de Morges, l’autre par le conservateur de son oeuvre, le pasteur Jean-Pierre Menu, en 1997. La quantité est impressionnante. On est encore plus stupéfait quand on voit la qualité de ces dessins précis, graphiques, souvent épurés. Mais comment sélectionner parmi tant de pièces celles qui seront montrées au public? Le premier défi consista à répertorier chacune d’elles, un même thème étant parfois traité avec des techniques différentes: crayon, fusain, lavis, encre de Chine et aquarelle. Il fallut donc les repérer et les rassembler. Vint ensuite le délicat moment du choix et le montage de l’exposition, réalisé de concert avec Mme Nadia Pierro, décoratrice-scénographe du MMV.

Le résultat est parlant. On découvre l’homme qui, grâce à l’intervention de son ami le colonel Robert Moulin, put être engagé comme peintre militaire du régiment du Pays de Vaud. Durant toute la mobilisation, il suivit les troupes et, sans s’arrêter, représenta la vie des soldats, ce qu’il expliqua lui-même ainsi: «Je n’ai pas illustré le règlement, mais vivant au milieu de la troupe, j’ai pu saisir ce qui me paraissait répondre au sentiment que j’avais de l’homme.»

Résumer la carrière d’Henry Meylan aux six années passées aux côtés des soldats serait malgré tout réducteur. Sourd depuis l’été 1916 (la surdité d’Henry Meylan fut probablement causée par des soins insuffisants à la suite de l’explosion d’une grenade à proximité du jeune homme, associés à deux facteurs aggravants: un hiver 1918 très rigoureux et une pathologie au niveau de la chaîne des osselets de l’oreille), Henry Meylan se détourna de la profession de notaire pour embrasser celle d’artiste. A la suite de ses études aux Beaux-Arts de Genève eut lieu sa première exposition, au Musée Arlaud (à l’époque il s’appelle ainsi), en 1920. Il partit ensuite en Espagne, puis à Paris, à Saint-Tropez et en Bretagne. Ses voyages l’inspirèrent, tant au niveau des couleurs que des styles; il ne cessa de peindre. Cependant, sa surdité le coupe du monde. «Parce que je suis sourd et parce que je suis esclave de mes yeux, je suis un visuel. C’est pour ça que je me suis exprimé avec des styles si différents.» Il vécut de sa peinture, difficilement et courageusement.

Le rêve de Noémie Weissbrodt? Etablir un catalogue raisonné de l’oeuvre militaire d’Henry Meylan. Cela risque de prendre dix voire vingt ans, le temps que tous les possesseurs de dessins ou peintures de la période militaire du peintre se manifestent. Nombreux sont en effet ceux qui possèdent une de ses toiles, ou un de ses dessins, sans en connaître la valeur. Puisse cet article être un appel aux heureux propriétaires: qu’ils se fassent connaître! Nous encourageons aussi vivement nos lecteurs à découvrir rapidement cette exposition, prolongée jusqu’au 4 décembre.

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