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SUVA – CNA, on nous écrit

RédactionOn nous écrit
La Nation n° 1997 11 juillet 2014

Un de nos fidèles lecteurs, M. Robert Georges, nous corrige au sujet de la CNA – ou plutôt la Suva (Schweizerische Unfallversicherungsanstalt) selon la désignation désormais imposée sur tout le territoire suisse – et son administration présentée comme peu efficace:

Votre analyse pertinente de la situation de l’assurance maladie est bien conforme à la réalité. Malheureusement cette proposition d’assurance maladie obligatoire, acceptée en votation populaire avec ma voix, s’est révélée une escroquerie aux dépens de la crédulité populaire, qui espérait une assurance vraiment sociale. Je ne m’étends pas sur l’énumération de ses graves défauts, mais je veux simplement vous signaler une énorme méconnaissance au sujet de la CNA […], qui a tout autre statut et champ d’activité.

Lorsque l’assurance accident a été rendue obligatoire, les compagnies privées ont rapidement assuré tous les bons risques professionnels à des taux très légers (2%o?), les risques étant pratiquement nuls avec les outils et machines dans les professions libérales, les administrations, les banques, les entreprises de ventes et de services.

Mais ces compagnies n’ont pas voulu assurer les métiers manuels à risques et à gros risques, employant les machines rudimentaires de l’époque, avec courroies et arbres de transmission. Tous ces travailleurs de la pierre, du bois et de la construction restaient inassurables pour les assureurs qui ne voulaient pas prendre ces risques.

La solution ne pouvait être qu’une application de la loi par ceux qui en avaient voté l’obligation: ainsi fut créée la CNA pour assurer tous les mauvais risques.

Elle a créé un service de prévention exemplaire, qui a développé normes de construction et systèmes de protection pour éviter les accidents. Elle a des inspecteurs qui vont contrôler si les installations d’usines et de chantiers sont conformes, si les protections sont bien utilisées. La diminution des accidents et de leur gravité a eu un coût: les dépenses de la CNA sont évidemment plus élevées que celles des compagnies privées qui n’ont rien fait. Avec seulement «la moitié plus», elle a une gestion exemplaire…

Elle n’est pas «obligatoire pour certaines professions», simplement elle garde les entreprises refusées à l’époque par les compagnies d’assurances autorisées en Suisse. Elle n’est donc pas «unique». C’est sa mission qui est extraordinaire […].

L’élément de comparaison de toutes les assurances accidents est celui des primes pour l’assurance accident non professionnelle (loisirs et maison): le taux était de 10des salaires (très proche des 10il y a 30 ans pour toutes les compagnies, y compris la CNA). Je ne connais pas les taux actuels, mais ils étaient en progression, comme les accidents de montagne et de ski. A l’époque la scierie était à 60, soit trente fois la prime d’une banque, alors qu’il y a cent fois plus de risques.

Depuis 30 ans, avec l’introduction des bonus / malus et un peu de poisse, il peut atteindre 100, voire plus.

RG

Ajoutons encore au crédit de la Suva qu’elle s’engage aussi dans la rééducation et la réinsertion professionnelle des victimes d’accidents, ce qui justifie un niveau de primes et de coûts administratifs supérieurs par rapport à un assureur privé. Mais relativisons cette efficacité administrative au vu du modèle de gestion qui passe d’abord par les employeurs: gérer 121’000 entreprises est certainement plus simple et moins onéreux que de traiter les dossiers individuels des deux millions de personnes qui y sont employées.

Une caisse maladie publique pourrait- elle bénéficier des vertus prêtées à la Suva? Il y a plusieurs raisons de conclure par la négative à cette question. Premièrement, le système d’incitation qui prévaut à la Suva – primes différentes par secteur professionnel, bonus/malus selon le nombre d’accidents – est tout simplement impensable pour l’assurance maladie: une taxation selon l’âge, le tabagisme, la toxicomanie les habitudes alimentaires ou tout autre critère, même objectif, est contre le principe de solidarité de la LAMal. Ensuite, comme le souligne M. Georges dans sa lettre, la Suva s’engage de manière très active pour la prévention, la définition et le contrôle des bonnes pratiques professionnelles. Veut-on vraiment déléguer ce rôle à une caisse publique en matière de santé? Nous frémissons d’imaginer la multiplication des spots TV salaces pour mieux gérer notre lovelife, des messages moralisants contre la cigarette ou le chasselas vaudois, de l’arrivée inopinée d’inspecteurs chargés de débusquer la malbouffe dans nos salles à manger familiales ou la prise adéquate des génériques prescrits par le médecin agréé de la Caisse…

Précisons enfin que la Suva est une entreprise aux prestations clairement définies, indépendante et financièrement autonome, alors que l’initiative prévoit une caisse maladie de droit public, dont les prestations encore à définir seraient gérées conjointement par la Confédération, les cantons, les assurés et les fournisseurs de prestations. L’efficacité administrative ne peut espérer arriver à la cheville de celle de la Suva.

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