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Stop aux spots!

Daniel Laufer
La Nation n° 1883 26 février 2010
Rachel, ma petite-fille, ne comprend pas pourquoi sa maman l’entraîne dans des magasins où tout est «sale». On me dira qu’il n’est jamais trop tôt pour commencer à apprendre l’anglais, mais la méthode ne me paraît pas très convaincante. Et j’admets avec A. Rochat, auteur d’un article consacré à la Défense du français dans la dernière Nation, que «la défense de notre langue est prioritaire». Mais faut-il une loi cantonale? Je m’étonne que l’on suggère ce moyen. Notre arsenal législatif est suffisamment fourni pour que l’Etat invite par décret toutes les entreprises et ses propres serviteurs à donner systématiquement la traduction française des termes ou des expressions dont ils pensent que «ça fait mieux» de les publier en anglais. C’est chose courante en France. Quant à Swisscom et autres swissmachin, c’est tellement grave qu’on se demande si le recours à l’anglais n’est pas une forme larvée de contestation du fédéralisme: ça coûte trop cher de tout publier dans les quatre langues nationales, donc hardi pour Directories!

Mais avant de proscrire l’anglais dans la publicité, il faut commencer par proscrire les fautes de français dans les textes de l’Etat de Vaud. Il est tout de même piquant de tomber dans la même Nation sur les perles orthographiques qui illustrent la nomination d’un directeur de gymnase. Et je souris à l’idée que l’on pourrait les retrouver dans le texte d’une loi proscrivant l’anglais dans la publicité!

L’exemple du Québec? Vraiment pas très convaincant. C’est de là-bas que nous est venue la fâcheuse et absurde manie, tout à fait contraire au génie de la langue française, d’ajouter un e pour prétendre féminiser les titres tels que pasteur, professeur, etc. Le français, faut-il le rappeler, ne connaît pas d’équivalent féminin des titres en eur terminé en eure. On a acteur et actrice, auteur et autrice (oui, c’est correct), directeur et directrice, etc… On a blanchisseur et blanchisseuse, vendangeur et vendangeuse ou docteur et doctoresse, etc., mais pas de pasteure. Si les Québécois protestent que le français est oublié aux jeux de Vancouver, ils seraient bien inspirés de parler eux-mêmes un français correct. D’ailleurs l’exemple du «stop» est particulièrement mal choisi: premièrement, en matière de circulation, il est impératif, du point de vue sécuritaire, d’admettre un code que n’importe qui, d’où qu’il vienne, puisse comprendre; en second lieu, le terme même de «stop», même s’il vient de l’anglais, est parfaitement admis en français et il est utilisé dans le sens que nous lui connaissons par les plus grands écrivains français, par exemple Maupassant. On peut gloser à l’infini sur la pureté d’une langue évaluée selon l’origine des mots, mais ça n’avance à rien. Chacun sait que tennis est un mot anglais… qui vient du français («tennez!»). S’il faut interdire le mot «stop», qui est français, à combien plus forte raison devrait-on interdire celui de «spot» qui ne l’est pas encore. Et le remplacer par quoi? Je suggère aux gens du Québec de lancer sur leurs chaînes de télévision une campagne de spots, titrée STOP AUX SPOTS!

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