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L’examen de la validité des initiatives populaires cantonales

Jean-François Cavin
La Nation n° 1895 13 août 2010
Les initiatives populaires cantonales se heurtent souvent au «droit supérieur», en particulier au droit fédéral qui s’est insinué presque partout. L’examen de leur validité donne donc lieu à des débats juridiques épineux, et épiques sur le plan politique. Car le Grand Conseil, compétent pour la décision sous réserve de recours à la Cour constitutionnelle, est suspect de trancher en fonction de critères politiques, selon que le fond de l’initiative plaît ou déplaît à la majorité du moment.

Le Conseil d’Etat, encouragé par un appel à la réforme venant de divers côtés, a cherché comment améliorer la procédure et, en principe, décharger le Grand Conseil de cette tâche. Il n’a pas trouvé de bonne solution et propose, faute de mieux, de se charger lui-même de la validation – ou alors de renoncer à toute décision à ce sujet, laissant aux initiants le soin de prendre leurs précautions et aux justiciables d’attaquer le cas échéant la disposition votée par le peuple.

Ni l’une, ni l’autre version ne présentent une amélioration. Le vote populaire sur un texte potentiellement entaché de nullité risque de tourner à la farce. Quant à conférer la compétence d’invalider une initiative populaire au Conseil d’Etat, cela créerait une disproportion institutionnelle: face au peuple qu’on dit souverain en démocratie, seuls ses représentants patentés au parlement font le poids dans la logique constitutionnelle. D’ailleurs, le Conseil d’Etat – qui serait tout aussi suspect de prendre des décisions politiques – a préféré ces derniers temps dans ses préavis, et préférerait demain comme organe de décision, laisser aller les choses: in dubio pro populo, dit-on dans un latin de cuisine politique.

Pourquoi ne pas confier cette décision éminemment juridique à la Cour constitutionnelle, comme nous l’avons suggéré dans une précédente Nation (No 1881 du 29 janvier 2010)? Le Conseil d’Etat dit qu’il aurait aimé adopter cette solution, mais qu’elle se heurte… au droit supérieur! En effet, l’article 88 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral prévoit que toute décision d’une autorité cantonale ayant trait aux droits politiques doit pouvoir faire l’objet d’un recours en seconde instance cantonale. La seule exception concerne les actes du parlement et du gouvernement. Donc la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal n’est pas assez suprême à l’échelon cantonal pour pouvoir prendre une décision en unique et dernière instance…

La loi sur le Tribunal fédéral a été rédigée dans le souci d’éviter la surcharge de Mon-Repos par des causes mineures insuffisamment décantées au préalable. Si l’on avait pensé, au moment de sa rédaction, à l’existence possible de cours constitutionnelles cantonales (probablement inconnues à l’époque, et peut-être spécialité vaudoise à l’heure actuelle), il est raisonnable de penser que l’exception consentie pour les autorités politiques supérieures aurait été élargie à ces tribunaux de haut rang.

La voie à suivre consiste donc à faire modifier la loi sur le Tribunal fédéral. En attendant, la moins mauvaise solution consiste à maintenir la compétence de Grand Conseil pour la validation des initiatives. A défaut de la rigueur juridique (la Cour constitutionnelle est censée y pourvoir sur recours), elle offre au moins l’occasion d’un premier débat sur la teneur des initiatives.

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