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Les seniors au travail!

Jean-François Cavin
La Nation n° 2041 1er avril 2016

La prospérité de notre pays le confronte presque en permanence, depuis plus d’un demi-siècle, à la pénurie de main-d'œuvre. Autrefois, c’était dans les métiers pénibles, salissants ou peu considérés; maintenant, c’est aussi dans des activités de spécialistes hautement qualifiés. L’application du nouvel article constitutionnel «contre l’immigration de masse» va encore aggraver la situation, selon toute vraisemblance. L’officialité et les milieux économiques militent donc en faveur d’une meilleure utilisation de deux «gisements» de forces de travail potentiels: la main-d'œuvre féminine et celle des seniors.

Mais il ne faut pas exagérer l’importance de ces réserves de travailleurs. Du côté des femmes, la Suisse est dans le peloton de tête du classement international de leur emploi – souvent à temps partiel, il est vrai, mais c’est ce qui leur convient; on ne va quand même pas les enrôler de force à 100%!

Du côté des seniors, on a l’impression soit que le chômage est relativement prononcé, soit que la retraite anticipée raréfie les forces disponibles. La lecture d’un numéro de 2015 de la revue Patrons, indispensable à qui veut bénéficier d’une vue réaliste de la vie économique, nous détrompe dans une large mesure.

Selon les chiffres de 2012 – et les choses n’ont pas dû beaucoup changer – l’âge moyen de sortie d’activité (tenant compte aussi bien des retraites anticipées que du travail après l’âge de l’AVS, notamment chez les indépendants) est proche de l’âge légal d’ouverture du droit à la rente: 63,9 ans pour les femmes, 66,1 ans pour les hommes. Le taux d’emploi des seniors de 55 à 69 ans (hommes et femmes confondus) est de 70,5%, alors que la moyenne de l’OCDE est de 54%; la Suisse est au cinquième rang derrière l’Islande, la Nouvelle- Zélande, la Suède et la Norvège. Pour les collaborateurs de plus de 60 ans, le taux de maintien en emploi est le quatrième de l’OCDE. Les retraites anticipées, qui ont connu un pic en 2006 avec un taux de 21,4%, ont diminué régulièrement, tombant à 17,1% en 2010. Le taux d’emploi des 65-69 ans atteint 20,3%, en progression de 2,7 points en dix ans. Quant au taux de chômage des seniors, de 3% en décembre 2014, il est plus bas que le taux global (3,4%).

Malgré ces données, il faut se garder d’émousser la volonté d’emploi des seniors, dont l’aptitude à remplir diverses fonctions ne saurait être mise en doute. Preuve en soit la collaboration à ce journal – hors statistique puisque bénévole – de plusieurs septuagénaires et octogénaires, voire d’un nonagénaire, dont la lucidité et la vigueur de style ne connaissent nulle faiblesse. La mode des retraites anticipées dans les entreprises atteintes de jeunisme et dans les administrations publiques privilégiant leurs serviteurs doit être combattue – sous réserve du cas des métiers pénibles et de rares autres exceptions. Et la politique sociale doit s’orienter vers l’élévation de l’âge normal de l’ouverture du droit aux prestations de vieillesse.

Mais dans l’immédiat, macro-économiquement, on ne doit pas s’illusionner sur l’importance de ce réservoir de main-d'œuvre. Les seniors au travail? Ils y sont déjà.

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