Persiflage viral
Superstition
Jadis, lorsqu’une grande calamité s’abattait sur une communauté, les gens se rassemblaient dans les églises et y allumaient des cierges. C’étaient des périodes d’obscurantisme et de superstitions religieuses. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde rationnel et scientifique. Lorsque survient une épidémie un peu vigousse, nos concitoyens tentent de conjurer le mauvais sort en peignant des lignes jaunes sur la moitié de la route et en empilant de vieilles palettes pleines d’herbes sur l’autre moitié.
Récupération
Les contempteurs de la société de consommation n’aimaient pas le monde dans lequel nous vivions – heureux et insouciants tout de même – avant l’apparition de la pandémie. L’idée d’un retour à la normale les plonge dans un déferlement de terreur et de fureur, eux qui ne rêvent que d’une nouvelle société radicalement différente, égalitaire et sans profit. Mais ces braves gens voient aujourd’hui leurs slogans récupérés par certaines grandes firmes multinationales, à commencer par un vendeur de soda mondialement connu (« Qui décide que l’on doit revenir à la normale ? »). Eh oui, les révolutions n’accouchent jamais du monde meilleur auquel on rêve.
Contamination
La nouvelle cause des humanistes occidentaux, c’est la révolution de couleur en Biélorussie. «La Biélorussie de papa est morte», a écrit un journaliste visiblement tourmenté par les conflits intergénérationnels. Dans les pays voisins, on assiste à des scénographies conçues pour être émouvantes: «Des dizaines de milliers de Lituaniens se sont donné la main dimanche pour former une chaîne humaine de solidarité avec les protestataires.» Aucun éditorialiste ne semble s’être offusqué de cette absence de geste barrière. Nous suffit-il, à nous Vaudois, de crier «Lukachenko!» pour que nous puissions aussi recommencer à nous serrer la main?
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- L’École vaudoise et la revalorisation de l’apprentissage – Editorial, Olivier Delacrétaz
- Ombres et lumières du tourisme – Lionel Hort
- Quand on ne peut plus donner sa vie – Jacques Perrin
- Delenda Helvetia – Jonathan Moratal
- Trente nuances de vert – Cédric Cossy
- Occident express 64 – David Laufer
- On nous écrit à propos du LS – Antoine Rochat
- Jean Rüf le facétieux – Jean-Philippe Chenaux