Identification
Veuillez vous identifier

Mot de passe oublié?
Rechercher


Recherche avancée

Top Gun

Simon Laufer
La Nation n° 2204 1er juillet 2022

Pression du doigt sur le bouton take off trim, alignement de l’appareil sur la piste, ailes déployées en position lock, vérification de la checklist pré-catapultage, déploiement des déflecteurs, allumage de la postcombustion, libération du holdback, déflagration. «Top Gun Maverick» est propulsé dans la culture populaire.

Tom Cruise est de ces acteurs qui ont réussi à se créer une telle image qu’ils soulèvent à eux seuls un film entier au point de le posséder dans l’esprit collectif. Ainsi «le dernier Tom Cruise», sobrement nommé «Maverick», tourne autour du protagoniste du premier opus de la franchise Top Gun, sorti en 1986. En bref, les USA font face à un danger inédit que seul Maverick est en mesure de combattre. La bêtise du scénario n’a d’équivalent que celle du spectateur qui espère y trouver autre chose qu’un blockbuster américain. Un «Tom Cruise» n’a pas pour but de cerner la nature humaine, de saisir le bien, le mal ou le sens de la vie. Un «Tom Cruise» c’est le danger, des esclandres, des embuscades, de l’action, de l’héroïsme à tout va et une bonne lampée de clichés hollywoodiens. En ce sens le spectateur sera comblé. Archicomblé même. Le film se tartine de caricatures, suinte et dégouline de clichés et se gave de stéréotypes. Il y en a pour tous les goûts. Des couchers de soleil à toute heure, des répliques téléphonées, des gentils très gentils et des méchants très méchants, un assistant qui vient nous rappeler qu’une scène fait référence au «Top Gun» premier du nom en faisant usage d’un subtil «BWOOOAAMM» afin de souligner le propos d’une scène, des sourires éclatants, des corps d’athlètes, des instincts frôlant l’omniscience, bref il n’y en a jamais assez. Toutefois, ces clichés sont parfaitement assumés. On en rajouterait presque encore une couche. On les aime en regardant «Top Gun» comme on aime une platée de rösti dans la brasserie du coin, une Bratwurst accompagnée d’une bière ou d’un Strudel lors d’une escapade à Berlin, voire d’un burger disproportionné lors d’un séjour chez l’Oncle Sam. Bref, c’est niais, mais qu’est-ce que c’est bon!

«Top Gun Maverick» n’est toutefois pas qu’un simple amoncellement de clichés. C’est d’abord une quantité himalayesque de scènes de voltige, d’action et de combats de toutes sortes. Ces scènes prennent une tout autre dimension lorsque l’on sait que de réels F/A 18 ont été utilisés et que les plans où Tom Cruise pilote ces derniers sont authentiques. C’est du grand spectacle, comme seuls les Américains savent le faire. La tension atteint son paroxysme lors du climax final dont la puissance atteint des sommets. Tout tourne, explose, se frôle, les machines hurlent, les projectiles fusent, les aéronefs se déchirent et les décors se distordent. La salle est en émoi. La force qui émane de ces plans est inédite. Néophytes, amateurs et experts sont happés par le spectacle, en témoignent les chiffres aux box-offices. «Top Gun Maverick» est, au sens le plus noble, un grand film de divertissement.

«Maverick» sait parler à son public tant par ses jeux d’artifices que par le langage et les outils sociaux et intellectuels qu’il emploie, le rendant éminemment accessible. C’est d’une part l’incarnation d’une rébellion personnelle contre les institutions et d’autre part le sens du devoir. La nature réactionnaire et patriotique du film est totalement assumée et semble faire écho chez son public. Le premier «Top Gun» ayant engendré une explosion des candidatures à la Navy américaine, cette dernière ne s’est pas fait prier pour contribuer financièrement à la réalisation du nouveau long-métrage. Les bureaux de postulation sont déjà ouverts et frétillent d’impatience. Les drapeaux américains pleuvent, l’armée est «cool», le devoir est excitant et rien ne semble pouvoir remplacer l’homme sur le terrain. Le message est clair.

L’ensemble du long-métrage baigne dans une ambiance faisant écho au premier opus, porté par sa bande originale, si réussie. Motos, style vestimentaire, voitures, décors, avions, musiques: tout y est, vraiment. Le public déguste la nostalgie à travers toutes ces variations et saveurs et ne fait qu’en redemander.

«Top Gun Maverick» est l’épitome du cinéma hollywoodien. C’est généreux, immense même, les artifices exorbitants sont assumés. Il n’y a pas de subtilité, que du grand spectacle. A force, on ne peut que s’en lasser, mais d’ici là, je reprendrais bien le plus gros menu de la carte avec supplément extra cheese and bacon.

Vous avez de la chance, cet article est en accès public. Mais La Nation a besoin d'abonnés, n'hésitez pas à remplir le formulaire ci-dessous.
*


 
  *        
*
*
*
*
*
*
* champs obligatoires
Au sommaire de cette même édition de La Nation: