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Les Vaudois de l’étranger et le Conseil des Etats

Félicien MonnierEditorial
La Nation n° 2290 17 octobre 2025

Les «Suisses de l’étranger» sont les personnes de nationalité suisse domiciliées à l’étranger. A la condition de s’annoncer auprès d’une représentation diplomatique et de figurer dans le Registre des Suisses de l’étranger, elles peuvent voter au niveau fédéral. Elles exercent leur droit de vote dans la dernière commune suisse dans laquelle elles étaient domiciliées avant leur départ1. Un Suisse n’ayant jamais été domicilié en Suisse votera dans sa commune d’origine2. Ce sera le cas des Suisses nés à l’étranger et n’ayant jamais vécu en Suisse, comme les enfants d’expatriés.

Lors des votations du 30 novembre 2025, le Grand Conseil et le Conseil d’Etat tenteront d’introduire dans la Constitution cantonale la notion de «Vaudois de l’étranger». Il s’agit d’offrir à ces personnes le droit d’élire les députés vaudois au Conseil des Etats. Cette élection a en effet un statut hybride, source de nombreux malentendus: si le Conseil des Etats est bel et bien une autorité fédérale, membre de l’Assemblée fédérale, les modalités d’élection en son sein dépendent des Cantons3. Cela n’est pas le cas pour le Conseil national, intégralement réglementé par la Confédération.

A ce jour, le corps électoral cantonal, habilité à élire et voter au niveau vaudois, exclut les personnes domiciliées à l’étranger. Elles ne peuvent donc pas élire les sénateurs, alors qu’elles peuvent, conformément au droit fédéral, élire les conseillers nationaux4. Parlement et Gouvernement prétendent y voir une «incohérence».

Ils tirent ainsi prétexte de la nature d’autorité fédérale du Conseil des Etats pour élargir le corps électoral des sénateurs vaudois aux «Vaudois de l’étranger». Cela est déjà le cas dans les autres cantons romands, à l’exception du Valais. Les Vaudois expatriés resteraient en revanche exclus des autres scrutins cantonaux.

La notion de «Vaudois de l’étranger» dépendra toujours du droit fédéral: il s’agira de Suisses expatriés, mais dont la dernière commune de domicile – ou la commune d’origine si celle-ci n’a jamais existé – est située dans le Canton de Vaud.

La Chambre haute a pour fonction de représenter les Cantons. C’est dans cette optique que ses modalités d’élection varient d’un Canton à l’autre. Jusqu’en 1917, c’était le Grand Conseil vaudois qui élisait les conseillers aux Etats. Et il était possible d’être à la fois conseiller d’Etat et sénateur. On attend des conseillers aux Etats qu’ils examinent les dossiers sous l’angle de l’intérêt de leur Canton en particulier, et des Cantons en général. Ils doivent être un rempart contre la tendance naturellement centralisatrice du Conseil national.

Rapprocher la composition de l’électorat du Conseil des Etats de celui du Conseil national –représentant un prétendu «peuple suisse» – revient à atténuer encore les dernières différences entre les deux Chambres. Concrètement, ce seraient environ 25'000 personnes qui se verraient attribuer un nouveau droit de vote dans le Canton de Vaud. C’est loin d’être anodin.

L’expérience nous a montré combien, d’élections en élections, le Conseil des Etats a fini par perdre sa fonction de Chambre des Cantons. Le scrutin populaire en est la cause principale, poussant à confondre les sources de légitimité, et donc la raison d’être et la représentativité de chacune des Chambres. Au point qu’on ne saura plus qui, du «peuple suisse» ou des Etats souverains qui composent la Confédération, la Chambre haute représente.

Dans l’attente que, comme nous le proposons5, les Sénateurs votent un jour sur instructions, même générales, et soient nommés par le Conseil d’Etat, préservons tout ce qui contribue à les distinguer des conseillers nationaux.

Le 30 novembre, nous voterons NON à l’octroi aux Vaudois de l’étranger du droit d’élire nos représentants au Conseil des Etats.

Notes:

1   Art. 18 al. 1 Loi fédérale sur les personnes et les institutions suisses de l’étranger (LSEtr) et art. 8 al. 1 OEStr.

2   Art. 8 al. 2 OEStr.

3   Art. 150 al. 3 Cst fédérale.

4   Art. 74 Cst vaudoise et art. 3 al. 1 Loi vaudoise sur les droits politiques (LEDP).

5   «Pour une vraie Chambre des Cantons», La Nation n° 2239 du 3 novembre 2023.

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