De l'opportunité de l'indéboulonnabilité
Eh bien nous ne partageons pas ce point de vue.
Soyons clair: nous n'avons pas d'objection particulière à ce que Mme Calmy-Rey démissionne. Mais nous désapprouvons le principe voulant qu'on exige le départ d'un conseiller fédéral – ou de quelque autre politicien – à chaque fois qu'une affaire politique se passe mal. Ce n'est pas ainsi que l'on résout un problème – si problème il y a.
S'il n'y a aucune faute dudit politicien, réclamer sa tête est une mesquinerie ignoble. S'il y a faute, il faut se souvenir que même des personnes compétentes peuvent commettre une faute; elles en retiennent généralement une leçon pour la suite et deviennent alors encore plus compétentes. On nous dira que les politiciens, et à plus forte raison les conseillers fédéraux, sont rarement compétents – «tous des pinkelis!», disent certains. Mais on devrait alors exiger leur démission avant qu'ils ne commettent des bourdes, et non après. Lorsqu'ils ont commis une bourde, on devrait au contraire exiger qu'ils restent à leur poste afin de réparer les dégâts. Peut-être s'amélioreront-ils ainsi.
Le fond du problème est que si les politiciens déméritants devaient toujours démissionner, nous aurions des élections tous les dimanches. Et qu'il est un peu facile de charger les membres d'un gouvernement de tous les maux alors que c'est la population dans son ensemble qui manque aujourd'hui d'intelligence, de perspicacité, d'assurance, de courage. L'immense majorité de ceux qui réclament aujourd'hui la démission de tel ou tel conseiller fédéral ne sont pas plus compétents et disent cela sans réfléchir, juste pour répéter ce que tout le monde dit; c'est petit, inélégant, énervant. De plus, la sagesse populaire sait qu'«un tiens vaut mieux que deux tu l'auras»; qu'avec un mauvais conseiller fédéral, «au moins on sait ce qu'on a»; et qu'en voulant le remplacer, on risque très souvent de tomber sur pire que lui.
Donc, dans le doute, non au changement!
Au sommaire de cette même édition de La Nation:
- La responsabilité sociale des entreprises – Editorial, Olivier Delacrétaz
- (Re)lire La légende du football de Georges Haldas – Lars Klawonn
- La paix, vite! – Revue de presse, Philippe Ramelet
- Enseignants ou éducateurs? – Revue de presse, Philippe Ramelet
- Au chevet de la Suisse multilingue – Revue de presse, Ernest Jomini
- † Jean Delacrétaz – Jean-François Cavin
- La politique des transports en Suisse – Antoine Rochat
- Conversations pastorales – Olivier Klunge
- Deux tendances – Nicolas de Araujo
- «Les droits, les droits, toujours les droits» – Revue de presse, Ernest Jomini