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Erreurs de la décentralisation et fédéralisme

Olivier Klunge
La Nation n° 1957 28 décembre 2012

Alors que le fédéralisme suisse souffre de l’emprise croissante de la Confédération dans tous les domaines politiques, la France, Etat centralisé par excellence, s’est engagée depuis 1982 dans un processus de décentralisation. Ce processus ne va pas sans mal. Comme ses prédécesseurs, François Hollande, à peine arrivé au pouvoir, cherche à réformer le système. Les principales critiques faites à la décentralisation à la française sont sa complexité (un labyrinthe où l’on discerne mal les compétences des communes, agglomérations de communes, départements et régions), son manque d’efficacité lié aux conflits de compétences générés par l’imbrication des responsabilités d’autorités aux couleurs politiques parfois opposées; enfin, on reproche à la décentralisation d’être fort onéreuse, avec quelque 600000 élus, la plus forte densité d’élus au mètre carré1, et un nombre de fonctionnaires en augmentation exponentielle.

Ces quelques faits montrent que la décentralisation française n’a que peu de points communs avec le fédéralisme suisse. Le système hexagonal procède d’une volonté de l’Etat central de déléguer certaines tâches à des entités autonomes locales (ce qui se rapproche, dans le langage politique suisse, du fédéralisme d’exécution), alors que la Suisse est fondée sur l’alliance perpétuelle de cantons souverains fondant une confédération, à laquelle ils délèguent des tâches afin de mieux garantir leur pérennité et leur indépendance. Ainsi, le fédéralisme suisse est fondé sur des cantons qui constituent chacun (plus ou moins fortement) une nation fondée sur une histoire, des traditions, des institutions et des mœurs spécifiques. Les départements français, au contraire, sont des circonscriptions administratives sans existence communautaire propre et les régions également.

La comparaison peut cependant apporter quelques enseignements. Nous nous garderons de donner des leçons à nos voisins mais les critiques faites par les Français à leur système de décentralisation devraient nous garder de tomber en Suisse dans les mêmes travers.

L’organisation institutionnelle de la Suisse est simple et claire. Il y a la Confédération, dont les tâches sont définies par la Constitution fédérale. Il y a les cantons qui ont toutes les compétences qui n’ont pas été déléguées à d’autres entités. Enfin il y a les communes dont l’autonomie et les compétences sont définies exclusivement dans chaque constitution cantonale. Pourtant, les réformistes de tout bord, en particulier les politiciens de gauche au pouvoir dans les villes, prétendent que la Confédération devrait agir directement avec les villes, les agglomérations, les espaces métropolitains, les régions fonctionnelles et j’en passe. On retrouve là le labyrinthe institutionnel français.

Alors que la France considère ses entités locales comme dispendieuses, nous voyons en Suisse que les petites administrations (les petites communes par rapport aux villes et aux cantons, les cantons par rapport à la Confédération) sont plus économes des deniers publics. Une explication de cette différence nous semble provenir du fait que les communes et les cantons ont la compétence de lever les impôts nécessaires à leur fonctionnement et surtout celui d’en fixer le taux. La pression des citoyens contribuables et la concurrence des voisins poussent donc à la parcimonie (certes toute relative).

Notons enfin que le coût de fonctionnement des autorités suisses est également nettement moins élevé que celui des parlements et exécutifs français, grâce au principe de milice qui fait que nos municipaux (à l’exception des plus grandes villes) et députés ne touchent (encore) que des indemnités parfois dérisoires, alors que les politiciens professionnels français se doivent de disposer, en plus d’un salaire, d’un secrétariat et de défraiements multiples, y compris pour les prébendes nécessaires à assurer leur réélection.

 

NOTES:

1 Le Figaro du 07.10.12.

 

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