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Reine des coeurs

Claire-Marie Lomenech
La Nation n° 1947 10 août 2012

Depuis un millénaire, elle trône sur la plus importante colline de la ville, comme régnant sur Lausanne. Notre-Dame fait partie non seulement de notre paysage culturel, mais aussi de notre patrimoine, de nos traditions et de notre foi. Ces quelques lignes, qui s’appuient sur une récente conférence de la prof. Martine Ostorero dans le cadre du Cours public du CEMEP, dont nous avons déjà parlé ici, ainsi que sur les travaux du prof. Jean-Daniel Morerod, souhaitent rendre hommage aux successifs constructeurs de cet édifice architectural majeur. Elles n’ont d’actualité que dans le fait que l’Eglise évangélique réformée du Canton de Vaud vient de mettre à disposition des visiteurs une nouvelle application pour téléphones portables. Celle-ci permet d’avoir un oeil nouveau sur la cathédrale de Lausanne et dévoile gratuitement les secrets du joyau de la Cité, particulièrement sur la rose, le portail peint, les animaux sculptés, les grandes orgues et la tour du guet. Quant à la nef, elle accueille cet été une belle exposition photo intitulée «Le Bestiaire du Christ» qu’il vaut la peine de voir, pour saisir l’ampleur et la richesse de la symbolique animale chez les médiévaux. Profitons à notre tour de la période estivale pour ranimer le souvenir de quelques belles pages de l’histoire religieuse régionale.

Le Moyen Age est fort lointain. Et le Moyen Age, qu’est-ce, sinon une vaste et vague période de mille ans, dont on ne se souvient plus très bien? Rares sont les documents qui nous permettent de mieux comprendre comment vivaient les hommes il y a plus de six cent ans, tant l’histoire, l’eau, le feu se sont appliqué à nous en séparer. Mais il nous en reste quand même, à partir desquels les historiens médiévistes font un travail extraordinaire pour reconstituer ce que fut la vie en Europe avant la découverte des Amériques et l’invention de l’imprimerie.

On sera par exemple étonné d’apprendre que, de 1450 à 1534, de Grands Pardons sont organisés à Lausanne, suite à une autorisation donnée par le Concile de Bâle en séjour sur les bords du Léman. Aujourd’hui, des Pardons ont encore lieu en Bretagne. Il s’agit, comme hier, de pèlerinages à caractère pénitentiel, durant lesquels les fidèles sont invités à se confesser. Ici, les Pardons ont lieu durant la semaine sainte, sur trois ou quatre jours, environ tous les sept ans. Une «véritable foule» participe au «Temps des Indulgences», qui commence par une procession à travers la Cité. Lieu central du Pardon, la chapelle de notre-Dame est située au bout méridional du transept de la cathédrale. Elle accueille actuellement les pèlerins de Saint-Jacques, comme la perpétuation d’une coutume vieille de nombreux siècles.

Lausanne est en effet située sur la Via Francigena (rétablie au XXIe siècle), qui mène les pèlerins à Rome. Au croisement de deux grandes voies, la cathédrale est elle-même un lieu de pèlerinage, en raison des reliques de la Passion du Christ et du martyre de la légion thébaine qu’elle abrite. C’est surtout au XIIIe siècle que celles-ci suscitent des miracles, guérisons de paralytiques, de muets ou d’aveugles, libérations de prisonniers, résurrections d’enfants mort-nés, afin de les baptiser et de leur permettre de connaître la vie éternelle. Cela dure jusqu’en 1536, année qui, on le sait, marque la fin de l’ère catholique vaudoise.

Mais les Vaudois continuent à aimer leur Dame et à le lui montrer. L’Annonciation, fête très populaire, est ancrée dans les traditions et continue d’être célébrée jusqu’au XIXe siècle par les protestants. On raconte aussi que les vieillards de Lavaux qui ne peuvent se rendre à Lausanne se font conduire sur la Roche de Notre-Dame, ce jusqu’au XVIIIe siècle. Situé entre Chexbres et Epesses, au-dessus du Dézaley, cet endroit leur permet de voir la cathédrale de Lausanne et de participer aux dévotions du jour. Le «Jour de la Dame» est fêté officiellement jusqu’en 1863, année à partir de laquelle il n’est plus férié, ce que regrettent les pasteurs de la ville.

Enfin, la Vierge a gardé la place qui lui est sienne dans le coeur des catholiques qui, sur le chemin conduisant d’Ecbalies à Lausanne, récitent trois Ave Maria chaque fois qu’ils aperçoivent les tours de la cathédrale, ainsi que le leur ont enseigné leurs aînés.

N’hésitons pas à rendre souvent visite en famille à cet édifice dont les murs ont vu passer l’histoire de notre Pays, du sacre des rois bourguignons Conrad le Pacifique et son fils Rodolphe III au serment de nos Conseillers d’Etat, en passant par les multiples démonstrations de foi. Les bases de la société.

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