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Le mitage des compétences cantonales / Référendum contre la révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire

Jean-Michel Henny
La Nation n° 1947 10 août 2012

Sous le prétexte d’un prétendu mitage du territoire, la Confédération veut imposer aux cantons des règles contraignantes qui portent atteinte à leur souveraineté dans un domaine où il est pourtant essentiel de tenir compte des particularités locales.

La modification de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire approuvée par l’Assemblée fédérale le 15 juin 2012 a fait parler d’elle juste avant les vacances. Un référendum a été lancé par un comité émanant principalement de l’union suisse des arts et métiers (USAM). La torpeur de l’été rend difficile la récolte des signatures.

Pour le moment, le Canton du Valais semble être le seul à avoir tenté le référendum cantonal. On attend encore les sept autres cantons qui pourraient, avec le Vieux Pays, obtenir un vote du peuple sur cette modification législative sans qu’il soit nécessaire de recueillir 50000 signatures.

Contrairement à ce que certains croient encore, cette révision ne porte pas que sur l’introduction obligatoire par les cantons d’une taxe compensatoire de 20% de la plus-value réalisée lorsqu’un bien-fonds bénéficie de mesures d’aménagement (collocation en zone à bâtir ou augmentation des capacités constructives d’une parcelle). D’ailleurs, plusieurs cantons ont déjà introduit cette mesure et les communes vaudoises peuvent le faire en adoptant un règlement topique.

La modification législative va bien au-delà de l’introduction de cette obligation et de la redéfinition, sous forme de réduction, des zones à bâtir.

De façon plus insidieuse, cette loi accroît les compétences fédérales au détriment des cantons, et ceci par le biais de l’institution du Plan directeur cantonal.

Il faut rappeler que chaque canton a l’obligation de faire approuver par le Conseil fédéral un plan directeur qui désigne les parties de son territoire qui «se prêtent à l’agriculture, se distinguent par leur beauté ou leur valeur, ont une importance pour le délassement ou exercent une fonction écologique marquante, sont gravement menacées par des forces naturelles ou par des nuisances». Ce plan doit également définir l’état et le développement souhaités de l’urbanisation, des transports et communications, de l’approvisionnement, ainsi que des constructions et installations publiques. Il doit tenir compte des conceptions et plans sectoriels de la Confédération, des plans directeurs des cantons voisins ainsi que des programmes de développement et des plans d’aménagement régionaux.

Le Plan directeur cantonal doit prévoir au minimum: «La façon de coordonner les activités qui ont des effets sur l’organisation du territoire, compte tenu du développement souhaité; l’ordre dans lequel il est envisagé d’exercer ces activités et les moyens à mettre en oeuvre». Ces dispositions ont été complétées par la modification législative du 17 décembre 2010 qui astreint les cantons à prendre des mesures pour «maintenir une proportion équilibrée de résidences principales et de résidences secondaires, ainsi que […] pour limiter le nombre de nouvelles résidences secondaires, promouvoir l’hôtellerie et les résidences principales à des prix abordables et améliorer le taux d’occupation des résidences secondaires». Cette disposition, on l’oublie souvent, est entrée en vigueur le 1er juillet 2011, soit neuf mois avant la votation sur «l’initiative Weber»!

Aujourd’hui, la modification qui nous est proposée va encore plus loin en ce sens que dans le domaine de l’urbanisation, où les cantons et les communes sont encore compétents, le plan directeur devrait à l’avenir définir en plus: «La dimension totale des surfaces affectées à l’urbanisation, leur répartition dans le canton et la manière de coordonner leur expansion à l’échelle régionale; la manière de coordonner l’urbanisation et les transports et de garantir un équipement rationnel qui permet d’économiser du terrain; la manière de concentrer le développement d’une urbanisation de qualité à l’intérieur du milieu bâti; la manière d’assurer la conformité des zones à bâtir aux conditions de l’art. 15; la manière de renforcer la requalification urbaine… ». Que reste-t-il comme marge de manoeuvre?

Ce sont les règles dont le Conseil fédéral vérifie l’existence lorsqu’il approuve le Plan directeur cantonal. Une fois approuvé, le plan est obligatoire pour toutes les autorités, qu’elles soient fédérales, cantonales ou communales. On comprend l’importance de cette planification directrice qui gouverne tout. Et pourtant, ce n’est pas une loi adoptée par l’Assemblée fédérale.

La modification du 15 juin 2012 contient en plus une disposition transitoire qui contraint les cantons à adopter leur plan directeur dans les cinq ans à compter de l’entrée en vigueur de la modification. Jusqu’à l’approbation de cette adaptation par le Conseil fédéral, la surface totale des zones à bâtir légalisées ne doit pas augmenter dans le canton concerné. La taxe compensatoire doit aussi être instaurée dans les cinq ans.

Ainsi que l’écrivait Félicien Monnier dans La Nation no 1944 du 29 juin 2012, la modification de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire va plus loin que l’initiative populaire «De l’espace pour l’homme et la nature (initiative pour le paysage)» à laquelle elle sert de contreprojet.

Les parlementaires fédéraux qui ont approuvé la modification de la loi fédérale ont donc réduit sensiblement non seulement les compétences cantonales, mais aussi leurs propres compétences puisque l’approbation des plans directeurs cantonaux leur échappe; c’est une compétence réservée au Conseil fédéral. Pour maintenir «de l’espace pour les cantons et leurs compétences…» et éviter le mitage de l’autonomie cantonale, il convient de signer la carte de référendum jointe à ce numéro.

 

Note :

On peut se procurer d’autres formules de signatures auprès de «non à la révision ratée de la loi sur l’aménagement du territoire», case postale 8161, 3001 Berne (info@sgv-usam.ch ou www.lat-revision-non.ch).

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