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La validation des initiatives populaires cantonales

Jean-François Cavin
La Nation n° 1966 3 mai 2013

La question de la validité des initiatives populaires cantonales se pose fréquemment dans la pratique. En effet, leur texte ne doit pas violer le «droit supérieur», par quoi il faut entendre en particulier l’ensemble du droit fédéral. On en connaît le foisonnement, et sa portée n’est pas toujours claire. Le risque est donc grand que des initiants proposent des normes contraires à la législation fédérale, ou du moins que leur conformité à cette législation génère de longues disputes. On en a vu l’exemple avec l’initiative de Franz Weber «Sauvez Lavaux III» et avec celle du parti socialiste visant à alléger la charge des primes d’assurance maladie des personnes de condition modeste par le biais d’un rabais d’impôt, reconnue contraire à la loi fédérale sur l’harmonisation fiscale.

Actuellement, selon l’article 80 de la Constitution vaudoise, c’est le Grand Conseil qui se prononce sur cette validité, au moment où il examine l’initiative aboutie avant de la soumettre au scrutin populaire. Mais le Grand Conseil est suspect de trancher selon sa sensibilité politique, au détriment de la sérénité juridique. Nous avons proposé naguère que la question de la validité relève de la Cour constitutionnelle, mais ce n’est actuellement pas possible, au regard des règles sur le recours au Tribunal fédéral, qui exigent que toute décision ayant trait aux droits politiques (sauf si elle émane du parlement ou du gouvernement) soit susceptible d’un recours en seconde instance cantonale. Cette exigence, d’ailleurs, nous semble inadéquate lorsqu’une cour constitutionnelle, tribunal de haut rang, a été saisie, et nous avons suggéré aux parlementaires vaudois de la faire assouplir; leurs démarches, si elles ont commencé (on en doute), n’ont pas abouti à ce jour.

Le peuple vaudois se prononcera donc début juin sur une modification du système.

Le nouvel article 80 de la Constitution aurait la teneur suivante:

Avant d’autoriser la récolte de signatures, le Conseil d’État valide les initiatives.

Il constate la nullité de celles qui:

a. sont contraires au droit supérieur

b. violent l’unité de rang, de forme ou de matière.

La décision du Conseil d’État est susceptible de recours à la Cour constitutionnelle.

Ce texte innove d’abord en instituant un contrôle de la validité des initiatives avant la récolte de signatures. Inconvénient: cela ralentit le processus du lancement; mais rares sont les cas où une initiative est lancée dans un élan soudain, sous le coup d’une émotion populaire; ses auteurs s’astreignent déjà à de sérieuses réflexions sur le texte, sans parler des préparatifs pratiques. Avantage: on limiterait le risque de décevoir douze mille signataires ou plus, frustrés que le fruit de leur engagement sincère soit annihilé par un trait de plume des juristes.

Ensuite, cette disposition désigne deux autorités nouvelles pour procéder à l’examen. Le Conseil d’État, d’abord, n’est certes pas à l’abri des dérives politiciennes; mais il faut bien une première instance; si le parlement, aujourd’hui, peut décider sur la base de motifs obscurs ressortant mal d’un débat peu systématique, l’exécutif se doit de présenter un raisonnement doté d’un minimum de cohérence juridique. Et si l’on voyait mal, quant à l’équilibre des pouvoirs, le Conseil d’État faire pièce à douze mille signataires, cette crainte est moindre dès lors que l’examen a lieu avant la récolte. De plus, la possibilité du recours à la Cour constitutionnelle accroît la sécurité juridique.

On peut donc approuver cette révision, en attendant celle du droit fédéral que nous continuons à appeler de nos vœux.

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