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Patates

Le Coin du Ronchon
La Nation n° 1913 22 avril 2011
«Il n’y a pas d’afflux de réfugiés en Europe», aurait déclaré dimanche dernier le président de la Croix-Rouge, M. Jakob Kellenberger. Les Français et les Italiens seront heureux d’apprendre cette bonne nouvelle, eux qui se chamaillent depuis des semaines pour savoir qui va accueillir les dizaines de milliers de Tunisiens qui, à peine la démocratie rétablie dans leur pays, se sont avisés que celui-ci n’était dès lors plus vivable et se sont précipités en flottilles entières à l’assaut des rivages européens.

Jean Raspail pouvait difficilement rêver mieux pour assurer la promotion de la troisième édition de son roman prémonitoire Le Camp des Saints (Robert Laffont 2011), qualifié précautionneusement de «brûlot sulfureux» par une Agence France Presse dont maintes dépêches semblent pourtant extraites de l’une ou l’autre page du livre en question. Signalons donc que ce dernier n’a pas encore été interdit par la censure, mais qu’il pourrait être bientôt épuisé puisque le nombre d’exemplaire vendus, s’il était révélé ici, ferait pâlir de jalousie le directeur des Cahiers de la Renaissance vaudoise1.

Il n’y a pas d’afflux de réfugiés en Europe, donc, mais on voit néanmoins débarquer chez nous des légions de dictateurs déchus et de révolutionnaires déçus qui, après avoir définitivement mis la pagaille dans les anciennes colonies, se verraient bien couler des jours heureux en métropole. Leur statut exact dépendra de la manière dont on contorsionnera l’interprétation de telle ou telle disposition de l’accord de Schengen, lequel a pourtant définitivement volé en éclats sous la pression migratoire actuelle. Car Schengen, tout comme l’ONU, ne fonctionne que par «beau temps»; lorsque les choses commencent à se gâter, les Etats qui le peuvent s’asseyent sur ce qu’ils ont signé et envoient leurs interlocuteurs se faire voir chez les Grecs – qui reçoivent désormais moins bien qu’auparavant.

C’est ainsi que le jeu de «Schengen» consiste aujourd’hui à accorder n’importe quel titre de séjour permettant aux immigrés indésirables de poursuivre rapidement leur voyage dans un autre pays d’Europe. On ne refuse pas l’entrée à ces pauvres gens qui fuient la démocratie, au contraire, on les accueille à bras ouverts… chez ses voisins. C’est le jeu de la patate chaude, avec, dans le rôle des patates, des foules grossissantes de réfugiés dont on sait qu’ils ne remplissent pas les critères pour se voir reconnaître le statut de réfugié, mais dont on espère qu’ils aillent se le faire dire ailleurs.

La question se pose maintenant de savoir si la Suisse suivra le cynisme des autres Etats européens, selon le sage principe du parallélisme approprié, ou si Berne va vouloir jouer au bon élève et prendre davantage que sa ration de patates. En l’occurrence, le rôle du bon élève semble peu recommandable, raison pour laquelle nous nous abstenons – exceptionnellement! – de rappeler l’importance de la future votation sur l’initiative «Ecole 2010».

 

NOTES:

1 Le prochain Cahier, dû à la plume de Jean-Blaise Rochat, sera excellent. N’omettez pas de l’acheter dès qu’il sortira.

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