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Jeux d’argent: suite et (lamentable) fin

Julien Le Fort
La Nation n° 1927 4 novembre 2011
Le grand chambardement en matière de jeux d’argent, dont La Nation s’est faite l’écho à plusieurs reprises1, a trouvé son épilogue. En effet, le comité d’initiative – proche de la Loterie romande –, après avoir lancé une initiative fort bien inspirée et avoir récolté plus de 170'000 signatures pour cette initiative… l’a retirée! Ce comité a ainsi démontré son réalisme émasculé et l’absence de conviction de ses membres.

En 2010, le Conseil fédéral a décidé d’opposer un contre-projet à l’initiative «pour des jeux d’argent au service du bien commun». Tandis que l’initiative prévoyait une compétence législative fédérale limitée aux principes en matière de loteries (et donc une compétence législative cantonale pour le surplus), le contre-projet optait pour une compétence législative totale de la Confédération. Voici en effet l’art. 106 du contre-projet: «La Confédération légifère sur les jeux d’argent en tenant compte des intérêts des cantons.» Notez au passage la suffisance avec laquelle la Confédération affirme qu’elle tiendra compte des intérêts des cantons; ceux-ci devraient-ils dire merci?

Maigre consolation: le contre-projet octroie aux cantons la compétence de surveiller et d’autoriser les loteries, paris sportifs et jeux d’adresse; il prévoit par ailleurs que «les cantons veillent à ce que les bénéfices nets [de ces jeux] soient intégralement affectés à des buts d’utilité publique, notamment dans les domaines culturel, social et sportif». En clair, cela signifie le maintien du fonctionnement actuel de la Loterie romande ainsi que son ancrage dans la Constitution fédérale.

Le 30 septembre dernier, le parlement fédéral a adopté sans amendement le contre-projet du Conseil fédéral. Comme suite, le comité d’initiative a annoncé le 12 octobre qu’il retirait son initiative parce qu’il estimait que ses trois objectifs principaux étaient satisfaits, à savoir la délimitation claire des compétences de la Confédération et des cantons, la garantie que les bénéfices des jeux d’argent seront toujours versés aux cantons à des fins d’utilité publique ainsi qu’à l’AVS et la prise en compte, par la Confédération et les cantons, des dangers liés aux jeux d’argent. Le comité a la mémoire courte et on comprend mal qu’il se satisfasse de ces objectifs.

En effet, il y a peu d’années, la Commission fédérale des maisons de jeux avait déclaré une guerre impitoyable et injuste à la Loterie romande, les machines Tactilo servant de casus belli. La Loterie romande avait contre-attaqué loyalement par l’initiative «pour des jeux d’argent au service du bien commun», très bien reçue dans la population. Cette initiative permettait à la Loterie romande de s’émanciper très largement de la tutelle fédérale et de gagner sa liberté. Dans ces circonstances, comment le comité d’initiative a-t-il osé retirer son initiative et retourner à son maître fédéral?

On regrettera longtemps que les membres du comité d’initiative n’aient pas été un chouia inspirés par la figure de William Wallace ou, pour le dire autrement, qu’ils n’aient jamais appris à l’école la fable du chien et du loup.

 

NOTES:

1 La Nation n° 1911 du 25 mars 2011, n° 1839 du 20 juin 2008, n° 1837 du 23 mai 2008.

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